Mauritanie: Ould Aziz reconnaît à Atar l’échec de sa politique de réconciliation nationale

(Crédit photo : Bakala kane)

{jcomments on}A quelques jours de la reprise de la grève de faim des réfugiés mauritaniens à Dakar, les récents rapatriés de Medina Salam à Rosso opposent depuis une semaine un bras de fer avec l’Agence Nationale d’Accueil et d’Insertion des Rapatriés (ANAIR) sur l’aménagement de 123 ha de terres agricoles que le directeur Bâ Madine a décidé unilatéralement de réaffecter à d’autres rapatriés dans le Sud du pays .

Ce cafouillage administratif révèle la politique de petits pas pour l’insertion des déportés et une mauvaise volonté de régler le passif humanitaire que le président mauritanien a reconnu lui-même à Atar au cours de sa rencontre radio-télévisée avec les populations locales à l’occasion de son troisième anniversaire.

C’est un rebondissement inattendu au sein de la seule structure jusqu’ici en Mauritanie qui s’occupe de l’insertion des déportés mauritaniens du Sénégal. L’ANAIR a défrayé la chronique la semaine passée en réaffectant unilatéralement les 123 ha de terres aménagées pour la culture du riz destinées au départ aux occupants de Médina Salam à d’autres rapatriés environnants. Il sagit des localités de Thiambene, Djamel,Diany, Karwaye et Kéba. Le patron de l’agence Bâ Madine s’est contenté de durcir le ton sans donner aucune explication de cette nouvelle décision. Ce bras de fer intervient une semaine après la tournée du Collectif des Victimes de la Répression ( COVIRE) dans la vallée du Fleuve Sénégal dont l’objectif est de faire l’état des lieues afin de débloquer la question des indemnisations des veufs et orphelins des familles militaires et des fonctionnaires victimes des événements de 89. Cette contribution modeste du COVIRE et ce cafouillage administratif de l’ANAIR révèlent au grand jour la politique de petits pas pour l’insertion des déportés en Mauritanie et la mauvaise volonté de régler le passif humanitaire. Le président Ould Aziz a reconnu lui-même à Atar cette semaine lors de sa rencontre radio télévisée avec les populations locales que seule la question des fonctionnaires déportés n’a pas été résolu continuant ainsi d’occulter les véritables mobiles de ce blocage. Dans ce contexte périlleux, la porte fermée au règlement définitif du passif humanitaire est de mauvais augure. Pas de rupture de méthode. Ould Aziz veut jouer avec le temps. Cette mauvaise volonté au plus haut sommet est révélatrice d’un chef d’Etat qui a tourné le dos à la réconciliation nationale depuis le putsch de 2008. Tout est prévisible chez Ould Aziz tant sa partition relève du populisme. De son mea culpa de Kaédi en 2009 avec la prière aux morts en passant par l’instauration d’une journée nationale de réconciliation nationale, la fameuse opération d’identification et de marquage des tombes des personnes victimes décédées depuis l’indépendance. Tout est destiné à faire des annonces médiatiques qui visent en particulier à mystifier la communauté négro mauritanienne sinon comment expliquer que le traitement de ce dossier épineux ait pris beaucoup de retards? Beaucoup de paroles et peu d’actes. Le vide programmatique est très significatif à cet égard .D’aucuns s’interrogent sur l’absence d’un débat national dont les conclusions auraient pu aboutir à la constitution d’une commission « Vérité et Réconciliation » pour consolider l’unité nationale et la cohésion sociale. Après cinquante ans d’indépendance, il s’agit de reconstruire une nouvelle société mauritanienne sur les ruines laissées par les décennies calamiteuses du régime de Ould Taya dont les criminels sont toujours à l’oeuvre au sein même du régime actuel ou tapis dans l’ombre en attendant leur tour aux commandes des affaires du pays. Comment expliquer ce silence du président sur les présumés coupables des événements de 89 et des massacres des militaires des années 90 et 91?Le nouvel homme fort le sait très bien et préfère pour l’instant fermé les yeux sur un quelconque procès et n’entend pas revenir sur l’abrogation de la loi qui a déjà amnitié la plupart des criminels militaires. Cette attitude est l’illustration parfaite d’un régime qui a fait de l’impunité son cheval de bataille. Tout le monde s’accorde à dire que c’est la raison principale qui bloque aujourd’hui la réconciliation nationale. Après trois années de pouvoir à quand Ould Aziz aura t-il une politique ayant des yeux en face des trous?

Bakala Kane

(Contribution reçue à Kassataya le 12/08/2012)

Diffusion partielle ou totale interdite sans la mention : Source : www.kassataya.com

Les opinions exprimées dans la rubrique Tribune n’engagent que leurs auteurs. Elles reflètent en aucune manière la position de www.kassataya.com 

 

Articles similaires

Bouton retour en haut de la page