Les nasséristes de Hannena

(Crédit photo : Rim24)

L’information qui a focalisé l’attention en fin de la semaine écoulée est incontestablement le retrait d’un groupe du mouvement nassériste des rangs du parti d’opposition  » Hatem « .

Elle aurait été anodine, si ceux qui se sont retirés n’avaient pas fait tout un tintamarre sur ce départ, qui, dit-on, serait intervenu après une audience que le président Aziz aurait accordée aux  » leaders  » de ce groupe. Ce qui n’étonne pas, outre mesure, si l’on connait le passé (et le présent) glorieux des membres, sympathisants et adeptes de cette  » loge « . Et surtout leurs rapports séculaires avec le pouvoir, le monde des renseignements et de …l’argent !

En fait, tout le monde savait que le parti Hatem était traversé verticalement par deux courants : les militaires et les civils. Horizontalement, le parti est écartelé entre deux courants idéologiques qui se tiraillaient autour de l’orientation qu’il faut imprimer aux positions et démarches du parti : les nationalistes arabes d’obédience nassériste et les islamistes proches du courant des frères musulmans.

Saleh Ould Hannena, lui-même nationaliste dès ses premières années de jeunesse, entré dans l’armée au début des années 80 avec un important groupe de ses compagnons pour agir, ultérieurement, à la manière des officiers libres en 1952, tanguait entre les deux. Jouant à l’équilibriste, l’homme a surtout  » navigué  » avec le vent, au gré des rapports internes dans sa formation qui avait, entre-temps, perdu l’ossature militaire des  » Cavaliers du Changement  » qui ont quitté le navire pour faire aboutir leurs ambitions ailleurs dans d’autres formations. La stratégie de  » redéploiement  » alimentera toutes les formations politiques à forte domination arabe. Elle permettra même la naissance de formations comme celle des ultranationalistes du RAFAH que dirige un ancien  » Cavalier  » !

En 2008, Hatem s’engagera dans la voie de la fronde pour maintenir son aile nassériste, putschiste par essence, dans ses rangs. C’est la cohésion au sein de l’esprit putschiste. Sans grande surprise, l’ex-comploteur Ould Hannena, soutenu par une forte aile putschiste au sein de son parti, appuiera, sans réserves, la prise du pouvoir par ses anciens frères d’armes, oubliant qu’ils étaient ses bourreaux et tortionnaires d’hier. L’ayant coiffé sur le fil du rasoir à deux reprises, le militaire digérera l’amère défaite et acceptera de soutenir les chefs militaires contre le comportement desquels il s’était révolté en 2000 puis s’est rebellé en 2005. Le dividende diplomatique de cette position sera assez juteux. Surtout après que le même groupe de nasséristes de Hatem eut convaincu le crypto-nassériste Ould Hannena (désormais traversé par des convulsions islamistes) de prêter allégeance au Guide de la Grandiose Révolution du Fateh ! Entendez bien Kadhafi. Et Hatem devient une carte de visite que trimballent les nasséristes, notamment El Kahalil Ould Teyib, coordinateur de l’action libyenne en Mauritanie depuis des décennies et la succursale des Comités révolutionnaires libyens en Mauritanie, la Démocratie directe.

Le révolté contre Ould Taya devenait, bizarrement, l’obligé docile de Kadhafi et l’instrument agile du tentaculaire groupe nassériste qui essaime partout, y compris même dans les formations politiques négro-mauritaniennes. L’élu du peuple qui rêvait d’être le Bolivar du désert brade la souveraineté de son pays et l’indépendance de sa nation moyennant une chose que l’on ne saura jamais. Pire, il signe même un document moyenâgeux portant son allégeance absolue à ce monarque sanguinaire qui finira quelque mois plus tard décapité par son peuple ! Depuis, Hannena n’était plus le brave officier qu’il était et Hatem était loin d’être la formation des justes qu’elle aurait due rester !

Kadhafi mort, Aziz toujours distant de Hatem, Ould Hannena trimballe son parti et sort avec fracas de la majorité présidentielle. Devenu  » pensionnaire  » de la COD, l’ex-téméraire commandant n’y va pas par le dos de la cuillère et exige, comme ses autres compagnons de la coalition, la chute du pouvoir. Il passe donc d’un extrême à l’autre. Et ceci ne sembla pas impressionner la colonne nassériste du parti, pourtant putschiste par essence !

Si les  » nasséristes  » décident de sortir au grand jour des rangs de Hatem, c’est que la consigne leur en a été donnée. Par qui ? C’est la question qui vaut réellement d’être posée.

Les nasséristes, groupe nationalise arabe dont les positions frisent le racisme voire la xénophobie affichée, n’existent que par leur arrimage au pouvoir ou à des puissances étrangères. Les fonds libyens et les  » support logistiques  » des centres culturels arabes à Nouakchott, en ont fait une force politique redoutable qui n’agit jamais à visage découvert. Infiltrant tous les rouages de l’Etat, ils ont réussi à échapper aux typhons de la répression politique qui s’était abattue sur toutes les formations politiques du pays. Excepté l’épisode Haidalla, en 1982, les nasséristes étaient plutôt les bourreaux des autres. Surtout contre leurs propres ennemis intimes, les baathistes et contre les négro-mauritaniens. A ces derniers, leurs administrateurs, leurs officiers et leurs agents on montré qu’ils avaient bien assimilé les leçons de la Gestapo !

Que les nasséristes sortent de Hatem ou y restent, ceci ne change rien dans l’image que les Mauritaniens se font d’eux : des apprentis idéologues qui s’accrochent à de vieilles idées sectaires fondées sur le mépris de la Mauritanie, de la démocratie et de l’égalité pour des chimères qui ne servent qu’à assurer la continuité de privilèges mal acquis !

Le temps est là pour édifier les Mauritaniens et la Mauritanie sur tout ce qui entoure cette nouvelle donne.

Amar Ould Béjà

Source  :  L’Authentique le 26/06/2012

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