Nous sommes un peuple de culture

(Beyrouk. Crédit photo : Arnaud Contreras)

N’en rions pas : nous sommes bien le peuple du million de poètes ! Avec 70% d’analphabètes et les 30% restant n’ayant jamais ouvert plus de cinq livres dans leur vie, nous sommes un peuple de culture.

N’est pas que nous avons fermé des dizaines de bibliothèques ? N’est ce pas que nos livres anciens ne servent qu’à être présentés aux touristes ? N’est ce pas que nous avons trois librairies dans tout le pays (en déficit chronique) ? Et d’ailleurs un ministre de la culture me déclarait il y a peu de temps : « A quoi servent les livres ? Il y a Internet maintenant ! » Nous sommes donc bien un peuple de culture !
C’est pourquoi j’ai été horrifié de voir au dernier Salon du Livre de Paris, un mauritanien se promener au milieu des stands. C’était le deuxième que j’y rencontrais en quelques années .Mais il est fou, me dis-je ? Qu’est ce qu’il fait ici ? Je soufflai un peu quand il m’expliqua qu’il écrivait des livres et qu’il vivait en France depuis très longtemps. Ce n’étais donc plus un vrai mauritanien. Ouf ! J’avais eu peur !
Ce mauritanien d’ailleurs, complètements coupé donc de notre pays, ayant donc perdu toute forme de culture, me montra des stands tenus par des pays africains, par des pays maghrébins, et dans sa naïveté, il me dit : « Pourquoi ne sommes-nous pas présents ? » Je ne répondis pas à une telle insolence. Nous sommes le pays du million de poètes, et c’est tout. Nous ne sommes pas obligés d’avoir des livres, ni de bons écrivains, ni même de librairies, ni d’exporter quoi que ce soit, nous somme un pays de culture ancestrale. Un point, un trait ! je citais en mon for intérieur des dizaines de noms que nous seuls connaissons, et des ulémas qui n’ont jamais rien publié. Il ne connait rien à rien,, ce mauritanien de l’extérieur
D’ailleurs, allez à la Bibliothèque Nationale, et ne dormez pas ! C’est calme, calme ! Allez au musée .Les vieilles choses reposent en paix. Personne ne les gêne. Et nos enseignants sont trop intelligents pour amener leurs élèves là-bas. D’ailleurs y a rien à voir. A combien s’élèvent les budgets de ces institutions ?
Durant le Festival de Ouadane, j’ai bien compris. Des milliers de gens sont venus. ! Pour voir le Président ! Ou pour la pétanque ! Ou pour le tir à la cible !Et une fois le Président parti, ils sont presque tous partis. Ceux qui sont restés étaient bien obligés. Même les gens de la Culture ! C’est pourquoi nous, une petite minorité heureusement, qui avons commis la bêtise de rester même après le boss, même sans être invités ni pris en charge par personne, nous avons bien compris : nous ne recommencerons pas. Car s’intéresser à ces choses, c’est comme nier une vérité simple : nous sommes un peuple de culture ! Le pays au million de poètes !

Beyrouk

Source  :  Beyrouk.com le 02/04/2012

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