avec le point d’orgue dramatique de la mort du jeune de Maghama, Lamine Mangane. Retour sur une année charnière en international, et tristement riche en Mauritanie.
Vingt ans après la chute du mur de Berlin, c’est une révolution d’une magnitude sans doute comparable qui s’est déroulé aux portes de la Mauritanie. Et c’est sans contestation l’événement de l’année 2011: le printemps arabe.
En Tunisie, d’où tombe le premier domino, la chute commence le 17 décembre 2010 avec Mohammed Bouazizi, un jeune vendeur ambulant, qui s’immole à Sidi Bouzid pour protester contre la saisie de sa marchandise par la police. Un mois et trois jours plus tard, sous la pression de la rue, le président Ben Ali prend la fuite. C’est le premier régime arabe à tomber, après 24 ans de pouvoir.
L’Égypte suit: Le 25 janvier 2011, la première manifestation a lieu sur la Place Tahrir au Caire, inspirée par la révolution tunisienne de Jasmin. C’est le début de plusieurs semaines de mobilisations des Égyptiens en vue de la chute du régime, qui sera effective trois semaines plus tard avec la démission de Hosni Moubarak quitte le pouvoir après trente ans de règne.
En Algérie, on assiste à des micro-secousses: Début janvier, cinq jours d’émeutes contre la vie chère et le chômage font 5 morts et plus de 800 blessés. Le 23 février, la levée de l’état d’urgence en vigueur depuis 1993, calme les choses, et Bouteflika prend les devants en commandant le 15 avril la tenue de consultations nationales d’urgence, en vue de réformes politiques. Les choses tassent.
Le Yémen sera le quatrième pays à trembler. À partir du 27 janvier, les premières mobilisations dans la capitale yéménite, Sanaa. Les manifestants réclament le départ du président yéménite Ali Abdallah Saleh, au pouvoir depuis 1978. les manifestants obtiennent le 23 novembre dernier le transfert du pouvoir de de Saleh vers le vice-président, Abd-Rabbou Mansour Hadi.
Le jeu de dominos continue, et le cinquième d’entre eux, la Libye, découvre la révolution la plus violente de toutes, et qui se conclut par l’exécution sommaire de Mouamar Kadhafi, le Guide au pouvoir depuis 40 ans. Cette révolution commence le 15 février par des manifestations à Benghazi. La répression meurtrière des autorités appelle d’autres manifestations, toutes aussi violemment réprimées. Le 17 mars l’ONU vote la résolution 1973 pour autoriser les frappes aériennes «en vue de protéger la population». L’OTAN entre officiellement dans la danse le 27 mars ; et ce qui devait être une opération internationale de protection des civils se transforme en guerre ouverte contre Kadhafi. Le 20 octobre, la guerre et la traque de Kadhafi se clôt par son exécution à Syrte.
À Bahreïn, les premières manifestations du 14 février aboutissent le 2 juillet à l’ouverture officielle du «dialogue national» au Bahreïn. Malgré ses réticences, le groupe d’opposition El Wefaq accepte de participer à ces discussions destinées à relancer le processus de réforme politique.
Le Maroc suit, le 20 février. Des manifestations de milliers de marocains dans plusieurs villes du pays, dont Rabat, Casablanca, Marrakech… Ils réclament un gouvernement aux pouvoirs élargis et des réformes politiques. Le roi Mohamed VI présente un projet de réforme constitutionnelle, le 17 juin. Les militants du «mouvement du 20 février» se disent insatisfaits de ce projet, et demandent des réformes politiques plus profondes: recul plus net des prérogatives royales, séparation des pouvoirs plus marquée notamment. Le 25 novembre les premières élections législatives ont lieu, remportées par les islamistes du Parti de la justice et du développement, dont le président, Abdelilah Benkirane devient le Premier Ministre de la nouvelle monarchie constitutionnelle chérifienne.
La dernière pièce de ce domino, la Syrie, n’est toujours pas tombée. Le 15 mars 2011, un rassemblement a lieu à Damas après un appel lancé sur Facebook. Début décembre, l’ONU annonce que plus de 5000 personnes ont été tuées en Syrie depuis ces premières manifestations. La ligue arabe, indécise durant plusieurs mois, décide en novembre de condamner fermement le régime de Damas. La Russie qui bloquait toute résolution et communiqué à l’ONU suit, le 10 décembre. Le dernier domino tremble, mais n’est toujours pas tombé.
D’autres manifestations ont eu lieu dans d’autres monarchies pétrolières du Golfe, toutes aussi dictatoriales, mais bizarrement comme le suggère Boubacar Boris dans l’entretien accordé à Noorinfo, les médias internationaux n’ont pas suivi, et « rien ne s’y passe ».
Côte d’Ivoire
La crise ivoirienne de 2010-2011 a débuté après le second tour de l’élection présidentielle ivoirienne de fin novembre 2010, le premier scrutin depuis 10 ans, dont le résultat a amené à un différend électoral, à la suite de fraudes présumées. Les deux candidats, Laurent Gbagbo, président sortant et reconnu par le Conseil constitutionnel, et Alassane Ouatta, reconnu par la Commission électorale indépendante et la communauté internationale, ont revendiqué chacun la victoire. Laurent Gbagbo, a refusé de reconnaître la victoire de son opposant et de transmettre le pouvoir. Le pays était plongé dans un conflit post-électoral qui s’est soldé par 3 000 morts et un million de déplacés.
Laurent Gbagbo a été finalement arrêté le 11 avril; l’implication de l’armée française apparaît évidente selon plusieurs témoignages. ce que clame haut Laurent Gbagbo lors de sa première comparution à La Haye. Le dernier bastion pro-Gbagbo est tombé le 4 mai; le même jour, Alassane Ouattara a été proclamé chef de l’État par le Conseil constitutionnel. Il a prêté serment le 6 mai, mettant ainsi un terme à cinq mois de crise.
Le Soudan du Sud
Le 9 juillet, le Soudan du Sud a officiellement proclamé son indépendance suite à un référendum organisé en
janvier dernier à l’occasion duquel près de 99% des votants ont opté pour la séparation du sud avec le nord du Soudan. Cette scission intervient après des années de guerre larvée entre les sud-soudanais, essentiellement chrétiens, et le régime de Khartoum, arabo-musulman.
Ce nouveau pays, riche en ressources pétrolières, partage ses frontières à l’est avec l’Éthiopie, au sud avec le Kenya et l’Ouganda et à l’ouest avec la RDC et la République centrafricaine. Il compte une superficie de 589.745 km2, et une population d’environ 8,5 millions de personnes. Le 14 juillet, il est devenu le 193e état-membre de l’ONU.
La Corne de l’Afrique
Depuis l’année dernière, la région de la Corne de l’Afrique, ainsi que le Kenya et l’Ouganda, sont confrontés à une sécheresse considérée comme la plus sévère depuis 60 ans. Alors que des centaines de femmes, vieux et enfants meurent chaque jour de faim, dans l’indifférence médiatique et de la communauté internationale, qui se mobilise tardivement.
Selon les estimations des Nations Unies, environ 12,4 millions de personnes auraient besoin d’une aide humanitaire, notamment en Somalie, où la moitié de la population est menacée par la famine.
En Mauritanie
Au niveau national, si un événement devait être retenu, ce serait certainement le feuilleton qui débute avec le processus de recensement très controversé, qui a vu la naissance d’un nouveau collectif, fondu aujourd’hui dans le paysage civil mauritanien, «touche pas à ma nationalité».
En début d’année, une vaste opération d’enrôlement de la population est lancée, en vue de «mettre en place un système national d’état civil et de produire les Titres Sécurisés» soutient sur son site, l’agence nationale du registre des populations et des titres sécurisés, créée spécialement à cet effet.
Dès la composition de la commission nationale chargée de ce recensement, les dents grinçaient, déjà sur une composition exclusivement maure, au détriment de toutes les autres composantes communautaires du pays. Les commissions régionales reflètent la même sélection exclusive.
À cela s’ajoutent, aux premières semaines des opérations d’enrôlement, les centaines de témoignages concordants, sur le questionnaire oral, «discriminatoire et raciste» auquel ne seraient soumis que les populations négro-mauritaniennes. C’est dans ce bouillant contexte qu’émerge le mouvement «touche pas à ma nationalité, qui dénonce globalement un «état toujours raciste», et particulièrement, réclame la fin des opérations d’enrôlement. À défaut d’obtenir totalement gain de cause, les autorités reculent à partir de la fin octobre quand les violentes émeutes qui démarrent dans le Gorgol, à Maghama et Kaédi notamment, et à Nouakchott, débouchent sur la mort du jeune Lamine Mangane. Le cocktail d’un embrasement communautaire étant réuni, les autorités réagissent en communiquant sur «un recensement qui n’oubliera aucun mauritanien», assure Mohamed Ould Abdel Aziz lors d’un discours télévisé.
Mamoudou Lamine Kane
Source : Noor Info le 19/12/2011
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