La future constitution mauritanienne inscrira noir sur blanc dans ses textes la criminalisation des changements constitutionnels et coups de force. Ainsi tous leurs auteurs d’où qu’ils viennent seront sévèrement punis.
Un nouveau chapitre dans l’histoire du pays auquel ont abouti cette semaine à Nouakchott, la majorité actuelle et les opposants dans le cadre du dialogue national qui a duré un mois. Pour les observateurs Ould Aziz gagne ainsi son pari de normalisation du régime et l’opposition sa première bataille politique de gouvernance démocratique malgré l’absence d’une dizaine de partis.
Le président mauritanien a surpris tout le monde y compris certainement les deux principaux leaders de l’opposition Ould Daddah du RFD et Ould Maouloud de l’UFP sceptiques et polarisés sur les accords de Dakar et la transparence des consultations électorales et qui avaient décidé de boycotter le dialogue national. Ils en oubliaient peut-être les attentes des citoyens qui n’ont pas attendu ce rendez-vous politique pour descendre dans la rue et demander des changements. En donnant ainsi son feu vert pour l’essentiel des accords issus du dialogue national entre sa majorité et l’opposition en conclave depuis un mois à Nouakchott, Ould Aziz joue la carte de la crédibilité et sort de son immobilisme légendaire.
Pour la première fois depuis Juillet 2009, les mauritaniens entrevoient une possibilité de vivre une stabilité politique avec la future constitution qui aura pour mission principale de criminaliser les changements constitutionnels et putschs qui ont caractérisé jusqu’ici les régimes du pays depuis 1978. Désormais les auteurs de ces crimes seront sévèrement punis par la loi .C’est un pas important en avant sur lequel on ne peut plus revenir en arrière et par conséquent engage les signataires à aller jusqu’au bout de leur peine. Finis les coups d’Etat militaire. Autre mécanisme tranché par le nouveau locataire de la Maison brune c’est la façon de réguler l’exercice du pouvoir du premier ministre qui sera toujours nommé par lui-même mais plus responsable devant le parlement lequel pourra le censurer.
Mais c’est toujours le président qui a le dernier mot. En réalité ce petit toilettage reste superficiel et ne rééquilibre pas les pouvoirs au sein de l’éxécutif. La nouvelle constituante devra aller plus loin parce que celle de1991 lui donne tous les pouvoirs .Ce qui lui permet d’intervenir au niveau de la justice personnellement et dans tous les autres rouages de l’Etat. Reste que les nouveaux accords de Nouakchott ont essayé de trouver aussi un terrain d’entente entre les deux parties pour mener à bien les élections législatives et municipales et sénatoriales partielles de 2012 avec la création d’une commission électorale indépendante dont la vocation est d’organiser et de publier les résultats à la place du ministère de l’intérieur. Une avancée certes vers la transparence mais les observateurs s’interrogent sur la composition de cette instance de son indépendance et de sa représentativité nationale d’où l’importance dans les prochains jours de la mise en place d’un comité de suivi pour l’application de tous les accords. T
ous ces changements n’auront de sens que s’ils peuvent redonner aux citoyens la confiance aux dirigeants à commencer par punir tous les coupables. Au moins si les participants n’ont pas réussi à obtenir la séparation des pouvoirs, ils ont pu aborder positivement la garantie des droits de l’homme en envisageant la criminalisation de l’esclavage et l’inscription de la diversité culturelle faisant allusion à la promotion des langues nationales mais toujours avec la primauté de la langue arabe comme langue officielle de la Mauritanie .Des décisions toujours timides et qui laissent penser encore une fois que le régime confirme le statu quo. Rien ne sert d’avoir des lois même si elles sont les meilleures si on ne les applique pas. Ces résultats peuvent lui donner une crédibilité mais une hirondelle ne fait pas le printemps. Hormis ce bémol Ould Aziz a gagné son pari de normalisation ou de légitimation de son régime qui fait aujourd’hui face à une crise économique et sociale d’une ampleur inédite surtout au moment où le déficit pluviométrique ne laisse personne indifférente.
L’eau et les pâturages sont devenus rares raison pour laquelle l’UFP, un des principaux partis d’opposition vient de lancer un appel à un sursaut humanitaire pour sauver le pays de la sècheresse. C’est aussi la victoire de l’opposition absente ou présente au dialogue national dont l’intransigeance a payé et permis d’arriver à une première lecture de gouvernance démocratique. Et au de-là ces avancées visent à transformer la classe politique mauritanienne toute entière. C’est une œuvre de longue mais il vaut mieux commencer par quelque chose.
Bakala Kane
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