Manifestations contre le recensement dans la Vallée: Le scénario de l’embrasement

Le premier mort, que tous craignaient vient d’être constaté, ce mardi 27 septembre, en début d’après-midi à Maghama, près de Boghé. Après Kaédi, les jeunesses des communes de Jowol, Sélibaby et Maghama s’élèvent contre l’opération d’enrôlement des populations. Tous les ingrédients d’un scénario d’embrasement.

«Une limite a été franchie. Peut-être que le temps du dialogue est révolu» ce sont en ces termes laconiques que le coordinateur du collectif «touches pas à ma nationalité», Abdoulaye Birane Wane a réagi à la mort de Lamine Mangane, ce jeune d’une vingtaine d’années, mort «sous les balles» de la police «ou de la gendarmerie» selon un manifestant de la commune joint au téléphone.

Adama N’Diaye représentant du collectif «touches pas à ma nationalité» à Maghama affirme que «la mort de Lamine Mangane a calmé les manifestants». «Le temps du deuil. Mais nous restons mobilisés. Neuf blessés graves, dont le chef de centre du bureau de recensement ont été acheminés vers Kaédi, et le centre de recensement a été brûlé» précise-t-il. «Trois véhicules antiémeutes ont été mobilisés suite à ces faits» dit-il.

Depuis le samedi dernier, et le début des violences à Kaédi, les villes de Jowol, Sélibaby et Maghama, se sont aussitôt jointes aux revendications du collectif «touches pas à ma nationalité» qui réclame la fin d’un recensement qu’il estime «raciste».

Dialogue de sourds

Le Ministre de l’Intérieur et de la Décentralisation Mohamed Ould Boilil est en train de faire des pieds et des mains pour maîtriser la situation qui prévaut depuis samedi matin dans la Vallée. Mais sa rencontre dimanche soir avec quelques cadres du collectif contre le recensement a été un «dialogue de sourds» selon Youssouf Sylla, un des membres du collectif.
«Aucun engagement n’a été pris», assure Wane Abdoul Birane, Coordinateur de «Touche pas à ma nationalité», à la fin de leur réunion.
«Nous avons posé le problème de Kaédi qui connaît des répressions. Pour nous, il est inadmissible qu’on laisse des citoyens sous cette répression. Le Ministre de l’Intérieur et de la Décentralisation doit agir parce que les forces de l’ordre sont en train d’agir comme dans un pays conquis. Nous avons aussi demandé à ce que nos camarades soient relâchés car rien ne prouve que ce soit eux qui ont brûlé le Palais de justice. Pour nous, ce sont des agents zélés qui veulent priver un nombre important de négro-mauritaniens de leur nationalité qui ont mis le feu au niveau du Palais de justice pour détruire tous ces documents de l’état civil. Nous lui avons fait savoir d’une manière très claire que nous rejetons toute responsabilité par rapport à ces violences», ajoute Wane Abdoul Birane.

Le scénario redouté de l’embrasement

Dans son discours d’ouverture de la rentrée de l’assemblée nationale, son président Messaoud Ould Boulkheir prévient des dangers en gestation dans ce recensement. «Le plus grand danger qui menace présentement la cohésion nationale est le recensement en cours. Ce qui m’amène à demander avec insistance au gouvernement de revoir ce programme qui a suscité d’innombrables interrogations et protestations dans certaines de nos villes. Tels les événements survenus tout dernièrement à Kaédi, causant des scènes de violence que nous condamnons de part et d’autre.» affirmait-il lundi soir. «On doit mettre fin à ce machin» acquiesce le secrétaire général de l’APP, Ladji Traoré.

Au fil des évènements, la situation est devenue incontrôlable pour la simple police, qui s’est vue adjoindre les renforts de la Garde et de la gendarmerie.
Mais rien n’y a fait: les manifestations de Kaédi en particulier ont dégénéré en affrontements avec les forces de l’ordre. Avec en point d’orgue, la mise à sac et l’incendie du palais de justice de la ville.
«Nos manifestants ne sont pas responsables de cette incendie» soutient le coordinateur du mouvement, tandis qu’une enquête a été ouverte pour situer les responsabilités. A l’heure actuelle, une trentaine de jeunes manifestants sont sous les verrous. Leur libération est attendue ce mardi en début de soirée, après la rencontre entre notables, wali et manifestants de Kaédi.

«Les autorités doivent garder à l’esprit que lorsque les morts entrent dans les comptes, personne ne peut prédire où ça se terminera. Les cas tunisien, libyen, égyptien, yéménite, syrien sont là pour le prouver. Dialoguons tant que c’est encore possible et que ces autorités comprennent que la répression aveugle ne fera que nous conforter dans nos positions et notre détermination à aller au bout. Le monde entier est témoin que les manifestations ont débuté pacifiquement et que c’est la brutalité policière qui a envenimé les choses. La violence appelle la violence.» argue longuement Djibril Thiam, jeune étudiant de Nouakchott, qui est retourné à son village natal Jowol, pour se joindre au mouvement de protestation qui commence à naître là-bas aussi.

MLK

Source  :   Noor Info le 27/09/2011

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