Canon de beauté : la bourgeoise africaine se met au fitness

Une_jeune_femme_courant_sur_la_corniche_parmi_tous_les_autres_sportifs._0A Dakar, c’est le dernier rendez-vous à la mode. Sur la corniche, à partir de 17 heures, quand le soleil tape moins fort, joggeurs et joggeuses courent le long de cette route, en face de l’océan Atlantique, bordée de palmiers.

Pourtant, « la place d’une femme dans le coeur d’un homme dépend de la place qu’elle occupe dans le lit. »

Ce proverbe africain est de moins en moins d’actualité. Depuis quatre ou cinq ans, les Sénégalaises aisées, comme beaucoup d’Africaines, se sont massivement mises au sport.

D’abord pour perdre du poids : on passe d’une norme de beauté africaine, où les formes sont valorisées, à une norme occidentale, où la minceur prime.

Mais elles font aussi du sport pour éviter les soucis de santé, souvent liés au poids : hypertension, diabète et problèmes cardio-vasculaires.

70% de femmes au Club Olympique de Dakar

En quatre ans, le nombre de femmes inscrites au Club Olympique, posé sur la corniche, est passé de 40 à 70% de la part des adhérents. Pourtant, accéder à un club de sport n’est pas à la portée de tout le monde.

Aida Diakité, 40 ans, professeur d'anglais, vient au club de sport tous les jours depuis un an (Damien Langry)

Au Sénégal, le revenu moyen est de 70 euros par mois et par personne. Pour s’inscrire au club, il faut déjà débourser 25 000 francs CFA, soit 38 euros. Professeur de sport au Club Olympique de Dakar, Ameth Kandji explique :

« Dans les années 80-90, les femmes préféraient être à l’aise, et c’est aussi comme ça que les hommes les aimaient. Ces femmes, on les appelle les drianké. Mais peu à peu, elles se sont rendues compte que leurs corps les faisaient souffrir. »

« Ne pas être comme ces énormes afro-américaines »

Fitness, step, vélo, tapis de marche, body combat… Matin et soir, machines et salles de sport font le plein. Aida Diakité, professeur d’anglais de 40 ans actuellement sans poste, vient s’entraîner tous les jours depuis un an pour prendre soin d’elle.

Pas vraiment pour « ressembler aux mannequins mais plus pour ne pas être comme ces énormes afro-américaines ». Comme toutes ses amies, elle a vu le modèle de beauté changer ces dernières années.

« Avant, c’était normal qu’à partir de 35 ans, les femmes aient une certaine corpulence et elles ne faisaient pas de sport. Or, aujourd’hui, même ma femme de ménage s’y est mise.

Quand elle s’est aperçue que nous avions le même âge et pas du tout la même corpulence, elle m’a demandé une paire de baskets pour aller courir. »

« Les hommes lui disent qu’elle est trop maigre »

Aujourd’hui, il faut donc être fine mais tout en gardant ses formes. Aida Diakité sourit :

« J’ai une copine qui a aussi 40 ans. Elle est mince et à la salle de sport, les hommes lui disent qu’elle est trop maigre. En gros, les Sénégalais veulent à la fois une trentenaire bien en chair et une jeune fille mince. »

Aida Diakité, 40 ans, professeur d'anglais, vient au club de sport tous les jours depuis un an (Damien Langry)

 

Sur le steppeur (une machine où l’on fait semblant de monter des escaliers), Fatou Touré, 25 ans, écouteurs dans les oreilles, transpire près du coach qui lui donne son programme de la semaine.

Médecin ORL, elle s’est remise au sport il y a peu, étant sujette à des problèmes cardio-vasculaires. Avec son association de cardiologie, elle milite tous les week-end pour inciter les gens à pratiquer un sport.

« En Afrique, quand on est jeune fille, on est fine, mais dès qu’on se marie, on prend des formes. Il y a alors un laisser-aller. »

Dakar est une ville riche, les clubs de sport ne désemplissent donc pas.

En Mauritanie aussi

Cette tendance s’applique aussi dans les Comores ou en Ethiopie, où le célèbre marathonien Haile Gebreselassie est propriétaire d’une salle de sport. Les riches habitants d’Addis-Abeba, hommes comme femmes, viennent s’y entraîner.

A Nouakchott, la capitale mauritanienne, les riches sont moins nombreux mais femmes et jeunes filles aisées viennent aussi depuis peu s’entraîner dans les clubs.

Pour les Maures, être grosse a toujours été synonyme de beauté et de richesse. Mais là encore, le modèle occidental de minceur et les problèmes de santé liés au poids font leur effet.

Photos : une jeune femme courant sur la corniche ; Khady Fofana, 30 ans, fait du sport sur la corniche ; Aida Diakité, 40 ans, professeur d’anglais, vient au club de sport tous les jours depuis un an (Damien Langry).

Source:rue89

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