Même aux pires temps de Ould Taya, les partis politiques avaient toujours réussi, malgré les noyautages et les débauchages, à maintenir un cap assez clair. Du moins sur le plan des principes et des orientations.
Aujourd’hui, nous sommes en face d’une classe politique qui en ajoute plutôt à la confusion. Au niveau de l’opposition, les positions « maximalistes » pour la « trêve » de Messaoud Ould Boulkheir désarçonnent plus d’un admiratif de l’Homme. Jusque-là icône incontestée de la constance dans la défense des idées progressistes et justes, rejetant toute compromission avec l’injustice et l’arbitraire, l’homme semble aujourd’hui en difficulté avec lui-même. Ou avec la politique.
Son acharnement à pousser ses amis de la COD à accepter un remake de la farce de Dakar est plus qu’incompréhensible. L’ayant suivi, un temps, dans la nouvelle gymnastique d’une « realbolitig » qui semble le dépasser lui-même, le reste de l’opposition semble être sonnée et se rebiffe, à juste titre. Elle veut se ressaisir, mais ce sera à quel prix ?
Au lendemain du coup d’Etat du 06 août, les efforts des démocrates et des « caciques » de l’opposition ont été sabotés par les positions de compromission adoptées par certains partis dont le RFD et l’AJD-MR qui avaient, gratuitement et par pure naïveté politique et opportunisme à deux francs, soutenu un énième retour à l’ordre militaire. Mal en a pris tout le monde.
Le RFD qui avait fini par rompre les amarres s’est réveillé au dernier quart d’heure. Juste le temps de se constituer une partie de trop dans l’Accord de Dakar et réduire la marge de manœuvre du FNDD par l’intrusion d’une voie qui n’était en réalité qu’une variante de l’aile putschiste. Une autre force, l’AJD, elle, continue de sombrer et de naviguer sans boussole dans l’escarcelle d’une majorité dont les orientations s’avèrent être, au fil des mois, plus dangereuses pour la démocratie, l’égalité des citoyens et le respect des droits que les pires phases du régime de Ould Taya. Et en plongeant aujourd’hui, tête baissée, dans la farce de ce « dialogue-appât », Messaoud veut étouffer ce qui reste comme espoir pour les véritables démocrates de ce pays, ses véritables compagnons de plus de trente ans de lutte. Plus grave, il replonge dans la même erreur qu’Ahmed Ould Daddah, le 06 août 2008 !
Qu’il le comprenne ou pas, Messaoud est en train de vendre une âme jusque-là digne et forte qui puisait sa force de l’adhésion de tout un peuple et de gens déterminés à sa lutte. Pour un homme de la trempe de Messaoud, aucune compromission ne doit être envisagée. La seule position qui sied à son image de leader, à son passé et préserve encore la dignité et la stabilité de la Mauritanie est qu’il poursuive cette résistance éclairée, pacifique et fondée sur la pertinence et l’acharnement à dire la vérité et le disponibilité de faire tout sacrifier pour son triomphe. Tout le reste n’est qu’un charabia de petits laudateurs qui ne servira pas Messaoud en tant que leader, ni la Mauritanie et encore moins sa démocratie. D’ailleurs, n’est-il pas assez aberrant que Messaoud, incarnation légitime de la lutte de tout un peuple pour la justice, l’égalité et la démocratie se taise face à tant d’injustices, et d’inégalités que subissent des populations meurtries par et les agissements discriminatoires d’une administration de plus en plus désaxée et dévolue aux puissants qui ne semblent pas mal s’accommoder de tous les dysfonctionnements annonciateurs de la déconfiture d’une nation ??
Boidiel, homme du « SYSTEME », retrouve aujourd’hui les pas du « compagnon ». Il peut se permettre toutes les « manoeuvrettes »pour revenir dans les bonnes grâces du système qui l’a adopté et apprivoisé depuis belle lurette, car c’est son milieu naturel.
Mais de là à pousser Messaoud jusqu’à la compromission est inimaginable. Un ami visiteur nous a lancé un jour que l’adage dit que le ménage entre un bûcheron et un toubab ne peut jamais durer longtemps. Ce sera, sûrement le cas entre Messaoud et ceux qui le poussent à capituler pour des hypothétiques promesses qui ne peuvent pas être plus sacrées que la signature apposée par les tenants du pouvoir au bas du texte de l’Accord de Dakar qu’ils récusent aujourd’hui !
En d’autres termes, aller au dialogue parce qu’il y a une simple promesse d’ouverture des medias publics à l’opposition et une vague prédisposition à repousser la date d’un scrutin gagné en tout cas d’avance par le pouvoir, ne sauraient constituer des concessions fondamentales justifiant la jubilation que certains affichent.
Le dialogue doit être plus large, plus décomplexé et ne doit évoquer les élections qu’en dernier ressort. C’est-à-dire, après avoir revisité les fondements de l’Etat (institutions, égalité effective des citoyens et la lutte contre les discriminations à tous les niveaux, notamment sur le point de l’esclavage, la question culturelle, la question des réformes foncières et domaniales, les bases de la citoyenneté et le respect de l’intangibilité des droits découlant de l’indépendance du pays, le rôle de l’armée dans la société et l’égal accès de tous les fils du pays au service public et au recrutement dans tous les services, y compris ceux de l’administration civile, la magistrature, l’armée et j’en passe, la révision du partage des ressources économiques du pays pour plus d’équité et de justice afin que certains ne soient pas toujours plus riches et d’autres toujours plus misérables, etc). C’était pourtant le rêve de Messaoud ; un rêve de Messaoud.
Amar Ould Béjà
Source : l’Authentique le 22/08/2011
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