Libye :Paris et Nouakchott mènent des négociations secrètes

L’arrivée à Nouakchott, dimanche dernier, du ministre français des Affaires étrangères Alain Juppé, ne serait pas seulement liée à l’implication de la Mauritanie dans la lutte contre le terrorisme.

 

 

 

Trés sérieusement, l’on parle de négociations secrétes que la France ménerait avec le clan du conolel Kadafi par l’entremise de canaux officieux dont la mauritanie vient étre la téte de pont. c’est dans ce cadre qu’il faudrait placer la récente visite secrète du ministre des Affaires étrangéres Hamady Ould Hamady à Benghazi, fief de l’insurection contre le régime du « Guide », et celle qu’il a mené à Tripoli.

Le coût de la guerre en Libye devient insupportable pour la France : un million d’euros (environ 400 millions d’UM) à dépenser chaque jour dans un conflit à l’issue encore incertaine, même si l’objectif de l’Otan – qui ne peut plus faire marche arrière – est de chasser le colonel Kadhafi du pouvoir ! Dans cette guerre que d’aucuns qualifient d’étrange, la position de la communauté internationale est des plus ambiguë. A tous les niveaux, onusien, africain, européen, américain, français…mauritanien, chacun dit une chose et son contraire.  » Kadhafi doit partir « , clamé haut et fort, mais en coulisse, il s’avère que l’on négocie pour qu’il s’entende sur un compromis avec les insurgés ! Des renversements de situation politique qui rappellent étrangement ceux de la situation sur le terrain :  » les insurgés aux portes de Tripoli « , mais qui n’arrive toujours pas à assurer leur prise sur  » Misrata « , troisième ville de Libye, voie royale et dernier bouchon pour atteindre la capitale libyenne d’où le colonel Kadhafi dirige les opérations de récupération des positions perdues. C’est un peu comme au début de cette guerre des tranchées où il a suffi de peu de jours pour que les troupes restées fidèles au  » Guide « , soient à quelques dizaines de kilomètres de Benghazi, la ville d’où est partie l’insurrection et qui est devenue l’autre  » capitale «  où doivent se rendre les médiateurs à charge de trouver une issue négociée à la crise libyenne. A l’exemple du voyage secret que le ministre mauritanien des Affaires étrangères, Hamady Ould Hamady, a effectué dans la  » nouvelle capitale « , vingt-quatre heures seulement après le passage à Nouakchott du chef de la diplomatie française, Alain Juppé, et l’évocation par les médias internationaux de l’existence de négociations secrètes entre Paris et Tripoli. Le choix de la Mauritanie comme relais, mais aussi comme point de chute des négociateurs s’expliquerait par sa position géographique dans la région, mais aussi par la place que ce pays occupe auprès de Kaddafi et le statut que lui offre le gouvernement français. Dès lors les visites répétées et soutenues de ministres libyens à Nouakchott ces dernières semaines entrerait dans le cadre de cette mission confiée au Pouvoir de Nouakchott.

C’est donc une  » drôle de guerre «  dans laquelle le rôle de la communauté internationale, plus précisément de l’Occident, est de plus ambigu. C’est aussi une drôle de mission qui est confiée à la Mauritanie dès lors où se pays souffle le chaud et le froid – à l’image de tous les pays- dans la proposition de sortie de cirse.

Tout le monde se rappelle les tergiversations de la Mauritanie qui a dit a accompagné la campagne occidentale cherchant à bouter Kaddafi hors du pouvoir. Tout le monde se rappelle aussi de cette communauté internationale qui n’a décidé d’intervenir que quand Kadhafi avait repris la main

Effort

L’effort de la France, soutenu par la Grande Bretagne, n’est pas encore suffisant pour permettre aux insurgés de faire tomber le dictateur de Tripoli. L’impression qu’on a cherché tout simplement à l’affaiblir, pour établir une sorte d’équilibre de la terreur entre les deux camps, est renforcée aujourd’hui par la  » timidité «  de l’intervention de l’Otan qui ne s’en prend qu’aux positions avancées des forces de Kadhafi, et parle même de  » dommages collatéraux « , quand ses avions bombardent des convois d’insurgés.

C’est conscient de ce semi-échec, que l’Occident semble avoir choisi d’engager une médiation, parallèlement à l’effort militaire. Une médiation qui passe par Nouakchott, considérée comme une pièce maitresse dans la résolution de la crise libyenne.

Le cas libyen est révélateur de la tendance machiavélique de l’Occident de chercher, toujours, à tirer un profit quelconque de tout bouleversement géostratégique dans le monde ; et on ne peut pas dire que ce que les bouleversements énormes intervenus dans le monde arabe (Tunisie, Egypte, Libye, Yémen, Bahreïn, Syrie, pour ne citer que les  » fronts «  les plus chauds) n’arrange pas les affaires de cet Occident dominateur obnubilé par la puissance que lui confère la chute de l’ex Bloc communiste (dont la Russie actuelle n’est que le résidus) et les orientations purement économiques d’une Chine qui marchande son  » silence «  et son veto pour ne pas être inquiétée sur de soi-disant questions de droits de l’homme.

Ainsi, l’Occident (en fait, les USA, la France et la Grande Bretagne) n’a pas eu besoin d’inventer un  » péril «  Kadhafi pour entraîner ce pays dans une guerre qui ressemble, point par point, à celle qui a emporté le régime de Saddam Hussein : un conflit interethnique, une  » guerre de sécession «  entre l’Est (l’axe Tripoli – Syrte – Sebha) et l’Ouest (Benghazi – Adjedabia). Même si la théorie de la conspiration croisée contre le monde arabo-islamique n’est pas prouvée pour le moment, pour justifier les soulèvements en cascade qui secouent le monde arabe, on ne peut pas dire que ce qui s’y passe actuellement ne profite pas à l’Occident. Ce n’est pas un hasard si Israël, profitant du détournement du centre d’intérêt du monde des médias vers les zones de conflits et de tensions (Libye, Syrie, Bahreïn, Cote d’Ivoire, etc), est revenu à son sport favori : lancer des avions de combats et des chars à l’assaut de Gaza avec, comme prétexte, que des  » terroristes «  du Hamas doivent être liquidés !

En Libye aussi, Kadhafi a des comptes à rendre. Il est loin d’avoir soldé ses comptes dans l’affaire de Lockerbie et de l’avion d’UTA. Les dédommagements faramineux que la fondation de son fils Saïf el-Islam avait consentis aux familles des victimes écossaises et françaises n’ont pas complètements tu les ressentiments d’un Occident qui ne lui a jamais pardonné ses accointances réelles ou supposées avec les organisations terroristes des années 70 – 80 du siècle dernier. Et puis, revient encore en filigrane cette volonté de l’Occident d’éliminer tout ce qui peut menacer la sécurité d’Israël. Même si Kadhafi a fini par réviser ses positions extrémistes envers l’Occident, allant même jusqu’à coopérer avec lui dans sa supposée lutte contre le terrorisme, les puissants de ce monde se disent certainement qu’un  » Guide «  affaibli, à défaut d’être liquidé, vaut mieux qu’un dictateur dont les volte-face ont désarçonné plus d’un régime dans ce monde.

Et puis, les insurgés n’inspirent pas une totale confiance aux Occidentaux. La plupart de leurs dirigeants, y compris le président du Conseil national de Transition, Moustapha Abdel Jelil, et le chef de la  » nouvelle armée «  nationale, ancien ministre de l’Intérieur de la Jamahiriya, n’ont quitté le navire que quand ils ont pensé que la chute du Dictateur était inéluctable. Une façon de sauver leurs peaux, comme on pourrait le penser mais aussi et surtout, d’être aux commandes dans ce qui ressemble bien à une  » succession ouverte  » de Kadhafi.

Il y a aussi que ce stratège – comme il vient de le prouver par sa résistance inattendue aux frappes de l’Otan et aux incursions des insurgés – a voulu tout faire pour brouiller les cartes de l’Occident. En faisant croire qu’il y a une réelle connexion entre les opposants qui cherchent à mettre un terme à son long règne (41 ans de pouvoir sans partage) et Al Qaeda ! Une présomption qui, même si elle n’a pas été prise très au sérieux par les Occidentaux, a quand même laissé supposer que cela peut arriver un jour. Déjà, l’on parle de la récupération possible d’armes et de munitions sorties des casernes militaires libyennes par Al Qaeda au Maghreb Islamique (AQMI), ce qui est réellement une menace non seulement pour l’ensemble de la sous-région mais pour la sécurité des Occidentaux eux-mêmes, cibles privilégiées pour les chasseurs de rançons dans la zone sahélo-saharienne.

Plus prosaïquement, on peut dire aussi qu’une longue guerre en Libye est synonyme certes de pertes pour ce pays riche en pétrole mais d’énormes bénéfices pour ceux qui seront appelés, demain, pour sa reconstruction ! Et ça, les Occidentaux le savent très bien. N’est-ce pas là uneautre raison qui expliquerait le souci d ela France à trouver un compromis à tout moment ? Certainement ! Et cela serait l’un des objectifs de la visite dans notre pays du chef de la coopération du gouvernement de Sarkozy qui aurait missionné son homologue auprès des Libyens, dans la perspective d’une éventuelle résolution pacifique de la crise

Mohamed Sneiba

Source  :  L’Authentique le 17/07/2011

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