Mauritanie : sauver poissons et pêcheurs, un challenge pour le gouvernement de Ould Laghdaf

chalutier-1Les stocks de poissons sont surexploités et s’effondrent. Les océans se désertifient. Cette sonnette d’alarme lancée récemment par Océan 2012, une coalition européenne d’organisations qui luttent contre la surpêche dans le monde est aussi un avertissement  qui vient à point nommé au gouvernement de Ould Laghdaf qui a autorisé il n’y a pas longtemps à un mastodonte flottant chinois de pêcher sur ses aux territoriales par chalutage en bœuf, une technique interdite pourtant en Mauritanie qui peut racler tout le fond marin. Les observateurs sont inquiets de cette marchandisation de la mer qui pourrait mettre en péril l’écosystème marin et l’industrie de la pêche en Mauritanie.

La Mauritanie dispose l’une des côtes les plus poissonneuse au monde avec une zone économique exclusive (ZEE) de 200 miles nautiques dont la superficie s’étend sur 234 000 kilomètre carré. Des atouts qui ne font pas des mauritaniens de gros consommateurs des produits de la mer pour des raisons culturelles .En effet,le mauritanien est très friand de viande mais malheureusement le cheptel est en nette diminution. L’occasion justement d’inverser la tendance à condition que les autorités de Nouakchott mette fin aux pratiques de pêche destructrices des navires étrangers comme « Lafayette », ce mastodonte  chinois qui n’a pas d’équivalent dans le monde dans sa catégorie et qui pêchait légalement il y a quelque mois aux larges de Nouadhibou, la capitale économique. Une révélation récente de l’Union des Forces du Progrès ( UFP)  qui précisait que c’est un complexe bateau usine dont la capacité de tonnage défie toute concurrence avoisinant 300 000 tonnes l’équivalent des captures annuelles de tous les navires de l’Union Européenne. Un pillage qui risque de jeter un trouble sur les négociations actuelles des accords de pêche entre la Mauritanie et l’UE dont le premier round vient de se terminer à Nouakchott. La Mauritanie est accusée aussi à juste raison de laxiste dans la mesure où c’est le seul pays qui applique le TJB ou Tonnage Jauge Brut au lieu des quotas c’est-à-dire les droits de
pêche accordés pour un an pour une espèce et une zone données.
Officiellement  le carnet de commande maritime est plein avec en moyenne 151 navires européens qui pêchent régulièrement dans les eaux mauritaniennes, une flotte chinoise de 47 navires qui vont bientôt larguer les amarres sous la houlette de la société Poly-Hondone Pelagic Fishey qui vient de signer un important accord d’une durée de 25 ans avec la Mauritanie et qui porte sur l’exploitation de stocks de petits pélagiques, des bateaux japonais et sans compter ceux des pays africains en particulier le voisin Sénégal pour la pêche artisanale. Le gouvernement de Ould Laghdaf vient de prendre des mesures encourageantes puisque depuis le 15 juin dernier, tous les exploitants et propriétaires nationaux des embarcations  de cette filière devront embarquer que des marins mauritaniens. C’est un pas important dans l’insertion de milliers de jeunes qui sortent des écoles nationales de pêche maritime. Mais insuffisant pour booster les captures  qui avoisineraient les 80 000 tonnes par an. Il y’a plus de monde qui gravite autour mais cette filière traditionnelle utilise peu de moyens, peu de capitaux et génère peu de devises . C’est surtout la pêche industrielle qui rapporte beaucoup. A titre d’exemples : 100 millions de dollars par la Chine et 84 millions d’euros pour l’UE. Et  rentable aussi pour les principaux pilleurs  qui pratiquent la surpêche. Certains légalement et d’autres illégalement .Pour les observateurs la marchandisation des eaux territoriales conduit à long terme au péril de l’écosystème marin et à la disparition de l’industrie de la pêche en Mauritanie. Nul doute que cette situation pourrait même priver
d’ici quelques décennies  les mauritaniens de poissons et obligerait l’Etat à importer plus qu’elle n’exporte. S’il n’y a pas de poissons il n’ y aura pas de pêcheurs. C’est l’évidence même. Mais on en est pas encore là. Avec une production annuelle estimée à 300 000 tonnes,la pêche à elle seule assure la moitié des exportations mauritaniennes et 10 pour cent du PIB. Elle contribue à hauteur de 29 pour cent pour le budget national d’où pour le gouvernement de veiller constamment à l’état des stocks halieutiques. Ce n’est pas un simple vœu pieux mais une volonté de sauver poissons et pêcheurs à la fois. La protection de l’écosystème marin passe par l’interdiction des géants bateaux usines pollueurs  et équipés d’engins destructeurs pour les pélagiques et surtout le calamar qui évoluent dans une zone bien connue des riches armateurs.  Et au de-là  pour que les mauritaniens continuent de consommer et vendre du poisson il faudra développer les filières à terre. Malheureusement aujourd’hui mal en point et désorganisées en dehors de la Société mauritanienne de commercialisation du poisson (SMCP) qui n’a pas beaucoup de difficultés maintenant à congeler et stocker les produits frais des captures pour la flotte nationale et au final les conditionner avant de les expédier. Les chinois encore les chinois ont promis de construire des  usines modernes de transformation de poisson.
Comme pour la sécurité alimentaire, sauver les poissons et pêcheurs reste un pari difficile pour le gouvernement de Ould Laghdaf.

Baba Kane

Source: KASSATAYA

Articles similaires

Bouton retour en haut de la page