Entretien avec Sao Abdoulaye, maire de la commune de Niabina : « On est passé d’une commune sans mémoire, à une commune en pleine mutation »

Maire-de-Niabina-Sao-AbdoulayeMPR hier, Sao Abdoulaye est aujourd’hui militant de l’UDP qui attend impatiemment d’accueillir la présidente du parti, Naha Mint Mouknass ex ministre des affaires étrangères et de la coopération, en voyage à l’étranger.

C’est au lendemain de la tenue du Conseil Municipal extraordinaire que nous avons rencontré le maire de la commune. Sao Abdoulaye a bien voulu répondre à quelques questions que nous lui avons posées.

Quotidien de Nouakchott : Vous venez de tenir une session du conseil municipal à Garlol où se trouve localisé le siège de la commune. Quel était l’objet de cette session et quelles sont les décisions qui ont été prises ?
Sao Abdoulaye : Nous avons tenu effectivement une session du conseil municipal le mercredi 1er juin 2011. Elle était consacrée à l’examen et l’approbation du compte administratif de l’année 2010. La session s’est déroulée en présence du Wali adjoint chargé des affaires administratives du Brakna. Y ont assisté également 12 conseillers municipaux. Le quorum ayant été largement atteint, le conseil a valablement délibéré et adopté à l’unanimité l’approbation du compte administratif de l’exercice 2010.
Après cette session, j’ai fais une communication aux conseillers municipaux relative, d’une part, à la désignation de nos représentants à la commission chargée de la révision des listes électorales, et d’autre part, à l’arrivée prochaine du GRET pour le projet « AICHA » (Appui aux Initiatives Communales de l’Hydraulique et de l’Assainissement). Dans la même foulée, nous avons également tenu une session extraordinaire le 6 juin 2011, session à laquelle ont participé 11 conseillers municipaux en présence du wali adjoint chargé des affaires administratives du Brakna. Cette session extraordinaire était consacrée au budget complémentaire de l’exercice 2011. Pourquoi, parce que nous avons constaté que la première tranche de 2011, relative au Fonds Régional de Développement, une baisse d’un peu plus de 696.000 ouguiyas de l’allocation destinée au fonctionnement et l’augmentation du fonds d’équipement de 2 millions 28 milles. C’est pourquoi il est nécessaire de réaménager le budget. J’ai préparé la note explicative du réaménagement interne de ce budget. Car, au niveau du fonctionnement il y a une diminution globale du montant déjà cité et qui a été réparti entre les différentes rubriques, notamment : le chapitre 60, 64,65, 67 qui ont subit des diminutions. Quant au chapitre équipement, il a été augmenté et les 2 millions 28 mille ouguiyas ont été répartis entre le volet hydraulique, le volet construction de bâtiments et autres.
Donc en définitive notre budget a enregistré une augmentation globale d’un peu plus d’1 millions 330 mille ouguiyas, ce qui fait qu’il s’est retrouvé de la somme initiale de 23 millions à la somme d’un peu plus de 24 millions d’ouguiyas. Ainsi le budget complémentaire a été adopté à l’unanimité par les conseillers municipaux. Je dis bien à l’unanimité !
Après cela nous avons procédé à la désignation de deux conseillers municipaux pour nous représenter au sein de la commission chargée de la révision des listes électorales. Par ailleurs, le projet « AICHA » couvre six communes, à savoir : Quatre communes dans le Trarza et deux communes dans le Brakna. Ce projet hydraulique et assainissement concerne bien Rosso, Tékane, Keur-Macène et R’kiz. Dans le Brakna, les deux communes concernées sont la commune de Dar El Barka et celle de Niabina. Donc nous avons passé à l’approbation ou bien à l’autorisation pour la réalisation d’un plan communal hydraulique et assainissement au niveau de la commune, cela en application du plan de développement que nous avons élaboré pour la période 2011-2015. Après adoption du plan communal hydraulique et assainissement, nous avons désigné aussi les trois conseillers municipaux qui doivent nous représenter en comité de suivi au niveau local et au niveau national. Parce que les six communes ont un comité national qui pilote ce projet.

Justement au sujet de l’hydraulique, on parle d’un problème entre le village de Tchila et MBotto, de quoi s’agit-il ?

Ce projet hydraulique rentre dans le cadre de notre projet PSA/PDAI de la sécurité alimentaire financé par la Banque Islamique de Développement (BID). Il y a le volet hydraulique dans ce projet pour réaliser trois forages. Un forage entre MBotto et Tchila, un forage à Sorimalé et un forage à Mourtogal-Gar et Ali Baïdi. Pour ce qui est proprement dit du forage de MBotto et Tchila cela a fait l’objet de délibération. Le conseil municipal a adopté que le site soit désigné entre les deux villages. Ce qui a été fait puisque un site a été identifié au nord de MBotto et au sud de Tchila. Donc le site est entre MBotto et Tchila. Après cela, une autre délégation est venue pour mieux confirmer le site mais le chef du village de MBotto leur a montré le site de MBotto. Il semble que dans ce site du village, un forage y a été réalisé par l’accès universel. Mais le coordinateur du projet souhaiterait équiper ce forage d’un château d’eau et d’un réseau d’adduction avec l’installation de bornes fontaines au lieu de réaliser un autre forage conformément à notre requête et comme le stipule le projet. Parce que le projet peut bien supporter un forage complet mais le coordinateur a pris pour option l’équipement de ce forage.
Or les habitants de Tchila protestent contre une telle option de les approvisionner par un réseau d’adduction leur à partir du sud de MBotto qui risque de poser des problèmes. D’autant, semble t-il, que cette zone est inondable et pourrait causer des ennuis pendant l’hivernage. Mieux vaut donc faire un forage entre MBotto et Tchila au nord de MBotto ou à la rigueur à l’ouest de MBotto qui se rapproche de Tchila tout au moins. Nous avons soumis cette doléance par écrit au coordinateur du projet basé à Aleg pour lui notifier que les populations de Tchila et nous compris -conformément à notre délibération- souhaiteraient disposer d’un forage complet avec tous ses accessoires, plutôt que de profiter d’un forage déjà fait par accès universel et vouloir équiper ce forage là. Nous conseillers municipaux avec les populations de Tchila nous souhaiterions qu’il y ait un forage totalement autonome de la réalisation de accès universel. Parce qu’on ne sait pas s’il est bien fait ou non. Le coordinateur avait à un moment donné accepté le principe de faire un forage. Malheureusement il continue de persister sur son option car pour lui il est hors de question que l’Etat réalise un autre forage et que nous aussi on fasse un autre forage parallèle à côté. Bien sûr d’accord, si une telle option peut résoudre le problème et donner satisfaction à tout le monde, nous ne voyons aucun inconvénient. Malheureusement il faut se conformer aux mentalités des populations locales. Pour eux c’est un forage qu’il faut avoir. Pour eux c’est un forage désigné entre MBotto et Tchila. Les populations parlent bien de Tchila. Le problème ne se pose pas au niveau de MBotto. Il se pose au niveau de Tchila tout court. Malgré toutes les assurances données par le coordinateur du projet qui persiste dans son option, les populations de Tchila ont des craintes par rapport à la solution envisagée. Si le temps me le permet, je compte passer à Aleg sur le chemin du retour en vue de rencontrer le coordinateur à l’effet de le convaincre davantage à respecter le choix ou si vous le voulez les délibérations du conseil municipal qui avait opté pour la réalisation d’un forage complet entre MBotto et Tchila.

Une opération de recensement est en cours déjà à Nouakchott et va probablement démarrer bientôt à l’intérieur du pays. Où en est l’état des préparatifs pour permettre aux populations de se recenser dans de bonnes conditions ?
Pour ce qui est de cette opération de recensement malheureusement nous ne sommes pas informés. Nous en tant que maires, nous aurions dû avoir des circulaires, des documents écrits, des guides, des arrêtés qui expliquent comment l’opération est menée de bout en bout. Dommage nous ne sommes pas informés de ce travail là. Tout ce que nous entendons de cette histoire n’est que rumeur, fondée ou pas. Même les médias indépendants et officiels n’en parlent pas. Personne ici ne détient une information fiable sur cette opération de recensement. Ni le gouverneur de la région ni le hakem de la moughataa ne possèdent des informations pour pouvoir nous les répercuter en tant que maires proches des populations. Lesquelles d’ailleurs, nous harcèlent de questions pour lesquelles nous n’avons pas d’informations. Heureusement les opérations ont été lancées et les informations commencent à circuler et on apprend par le bouche-à-oreille que la première phase concerne la tranche d’âge de 45 ans et plus. Que la tranche d’âge inférieur à 45 ans n’est pas concernée pour l’instant. Pour la tranche d’âge des 45 ans et plus ils doivent obligatoirement fournir un extrait de naissance et une copie de la carte d’identité. Et aussi on ne peut pas se recenser tant que ses parents sont vivants ou un des parents soit le père ou la mère.
Actuellement je suis là, je viens de saisir le maire central de MBagne pour m’enquérir de la présence de l’agent de recensement. Il m’a dit que ce dernier est là mais le matériel n’est pas encore en place. Je lui ai suggéré alors une réunion des maires du département pour organiser le travail de recensement. Au lieu que tout le monde vienne en même temps au chef lieu du département, dès lors qu’il n’est prévu que 40 ou 50 personnes maximum qui vont se recenser tous les jours, il faut qu’on fasse un programme par commune. Nous avons quatre communes et nous avons un mois qui comprend quatre semaines. Ma proposition est que ces quatre semaines soient réparties entre les quatre communes. Ainsi chaque commune aura une semaine. Maintenant c’est cette commune seulement qui passera au recensement de ses habitants durant la semaine. Et au sein de cette commune on va désigner un village qui sera identifié par jour. De la sorte les 7 jours de la semaine permettront à 7 villages de se recenser à tour de rôle. Un village par jour qui va désigner 50 personnes pour aller se recenser. Je lui ait fais cette proposition et le mois prochain aussi on va recommencer la même méthode ainsi de suite jusqu’à la fin de l’opération de recensement.

Compte tenu des distances à parcourir, pensez-vous que les populations pourront se déplacer sans problème jusqu’à MBagne pour ce recensement ?
Effectivement il y aura des problèmes de transport, il n’y a pas de doute là-dessus. Mais chaque localité, pour les besoins de son état civil s’organisera pour transporter ses personnes le jour J. Donc c’est au niveau de chaque village que cela va s’organiser.

Bientôt des élections municipales et législatives vont avoir lieu en octobre. Au terme de votre mandat de cinq ans qui arrive à échéance dans quelques quatre mois, quel bilan faites-vous de ces cinq ans d’exercice au service des habitants de votre commune ?
Avant tout je suis très satisfait de ce mandat qui m’a permis de découvrir et de connaître les gens et le territoire communal ainsi que d’avoir des relations nouvelles. Cela étant, je puis dire qu’on est passé d’une commune sans mémoire, à une commune en pleine mutation. Commune sans mémoire parce que au 1er janvier 2007, date à laquelle nous avons accédé à la municipalité, nous n’avons trouvé aucune trace nous indiquant qu’il y avait une commune. Pas d’écrits ni d’archives, pas d’investissement, pas de bureau. Tenez-vous bien, notre première session au mois de janvier 2007, nous l’avons tenu dans une maison privée en empruntant les nattes des particuliers pour pouvoir la tenir. Alors face à cette situation, je m’étais fixé pour objectif premier d’avoir un bureau d’abord. Alhamdoulillah cet objectif a été réalisé au bout de deux ans. La première année a été consacrée à la fabrique des briques et la deuxième année à la construction de l’hôtel de ville à Garlol. C’est un bâtiment digne d’un hôtel de ville. Il a été équipé. II y a une salle de réunion bien équipée, une salle de séjour avec tout son équipement, le bureau du maire avec tout son mobilier, le bureau du secrétaire général, un bureau pour les archives, une loge de gardien et les toilettes. Tout est carrelé aussi. Il y a également un mur de clôture de l’hôtel de ville. D’autre part, l’hôtel de ville a été électrifié avec de l’énergie solaire sans compter qu’il y a l’eau actuellement. Donc tous les besoins fondamentaux de la commune sont satisfaits. Actuellement nous n’avons pas de problème de réunion. Même pendant la nuit, nous pouvons tenir des réunions parce que nous avons l’éclairage. Nous pouvons aussi nous connecter parce que nous avons nos ordinateurs et nous sommes équipés de clés chinguitel qui nous permettent la connexion Internet quand nous sommes au bureau ou ailleurs. C’est dire que nous ne sommes pas coupés du monde au niveau de notre siège. Aujourd’hui nous avons un siège qui fait honneur contrairement à notre date d’entrée à la commune.
Concernant l’hydraulique, durant la première année d’exercice, nous avons réalisé un puits à Mourtogal-Gar en 2007. Idem en 2008 pour Thiodi NGoulli où nous avons réalisé également un puits, même chose en 2010 pour nos rapatriés de NDiawaldi Senkétébé. Bien que l’Etat n’a pas réalisé de puits pour eux, nous avons fait un puits de 40 m de profondeur que nous avons équipé. Présentement nous avons achevé un autre puits pour Ali Baïdi pour cette année 2011. Sur le plan scolaire, nous avons construit deux salles de classe en 2007 à Niabina pour l’école II qui est opérationnelle. Nous avons réalisé en 2009, deux salles de classe à Miftah Al Khaïr. En 2010, nous avons réalisé une salle de classe à MBahé, une salle de classe à Sorimalé avec un équipement complet. Nous avons actuellement en cours de construction, une salle de classe à NDiawaldi Boulli, une salle de classe à MBotto et une salle de classe à Tchila. Je signale que toutes ces réalisations ont été faites sur le budget communal. Sur le plan religieux, nous avons dressé des salaires disons des indemnités mensuelles depuis 2007 à nos jours, à nos Imams de mosquée qui sont au nombre de huit (8) sur l’étendue du territoire communal à raison de 2.000 ouguiyas par Imam de mosquée, ce qui fait 12.000 ouguiyas par semestre. Nous avons ici un personnel qui est recruté notamment deux chauffeurs, un chargé des affaires administratives, un planton qui sont rémunérés sur le budget communal. Chose qui n’a jamais eu lieu puisqu’ils sont également immatriculés à la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS). Ce qui leur permet de bénéficier des allocations familiales. Je ne parle pas des subventions que nous accordons aux jeunes.
Maintenant, s’agissant de notre partenariat, j’ai effectué en 2008 une visite en Espagne. J’ai eu l’occasion de rencontrer cinq communes espagnoles auxquelles j’ai demandé de former une association. Je leur ai également soumis des doléances. Ils ont formé cette association qui s’appelle « Association-Formation-Ivida » qui veut dire association pour la formation et vie. Et à cette occasion comme je leur ai fait une doléance d’ambulance et d’un car de transport des élèves, ils m’ont envoyé en 2009 un container de 40 pieds venu par bateau rempli de médicaments exonéré de toutes les taxes. Voilà maintenant un car pour le transport des élèves, qui est opérationnel depuis 2009 à nos jours. Il transporte les élèves de MBotto, Tchila, Garlol, NDiawaldi Boulli, NDiawaldi Mango, Niabina, MBahé à destination du lycée de Bagodine. Par ailleurs, nous avons aussi une ambulance qui est venue en même temps que ce minibus. Elle évacue nos malades soit à Kaédi ou à Nouakchott. L’entretien de ces véhicules coûte cher à la commune. Il faut payer le chauffeur, le gasoil et l’entretien. Et c’est la commune qui prend tous les frais en charge sur le budget communal. Par ailleurs, pour les médicaments et le matériel médical je les ai distribué aux cinq postes de santé de la commune. Nous voulons former le personnel de santé et je lutte pour qu’il soit formé en Espagne. D’ailleurs dois-je le signaler, nos partenaires espagnols envisagent de nous envoyer 500 tables bancs démontables alors que dans mon plan de développement communal, j’ai un déficit de 300 tables bancs. Voilà pourquoi, disais-je tantôt, que nous sommes passés d’une commune sans mémoire à une commune en pleine mutation surtout au moment où un ambitieux plan de développement communal vient d’être concocté avec World Vision pour le développement agro-pastoral de la commune devant consacrer un ensemble de réalisations dans ce domaine pour booster l’économie de la commune.

Dernière question, pensez-vous rempiler sous les couleurs de l’UDP aux prochaines élections ?
En tout cas les prochaines élections, c’est les prochaines élections. On ne peut prédire l’avenir comme ça. Nous sommes des acteurs politiques et nous attendons de pied ferme ces échéances électorales. Dieu seul sait qui se portera candidat ou non. Pour ce qui nous concerne nous ne pouvons pas dire que tel ou tel se porte candidat. On attend le moment opportun pour que les choses s’éclaircissent avant que les gens ne se prononcent.

Propos recueillis par Moussa Diop

Source: Le quotidien de Nouakchott

Articles similaires

Bouton retour en haut de la page