Ould Abdel Aziz le président des « nouveaux riches »

Près de 14 milliards d’ouguiya octroyés par l’Arabie Saoudite en 2009 et dépensés sans le visa du parlement mauritanien et 9 milliards d’ouguiya débloqués en 2010 pour l’opération d’urgence des boutiques témoins pour lutter contre la hausse des prix des denrées alimentaires sans au préalable un décret de programmation.

 

Ce non respect du président Ould Aziz de la réglementation des financements publiques vient d’être dénoncé dans un rapport publié par le parti de l’opposition l’UFP.

Ce rapport fustige par la même occasion le surendettement des trois grandes entreprises publiques d’eau, d’électricité et de gaz dont le montant est estimée à 55 milliards d’ouguiya. Pour les observateurs, cette gouvernance déficiente pourrait ébranler le fauteuil du président des pauvres qui n’a pas encore réussi à refonder l’Etat mauritanien dont la gestion est calamiteuse depuis son élection en juillet 2009.

Ce n’est pas la première fois que l’opposition constate la gabegie au plus haut sommet de l’Etat depuis l’avènement au pouvoir de Ould Aziz .De l’UFP à l’APP en passant par le RFD la mal gouvernance des finances publiques est au cœur des critiques.

Les observateurs imputent ce déballage médiatique de l’opposition au refus ou à la lenteur du dialogue inclusif recommandé par les accords de Dakar . C’est indéniable le nouveau locataire de la Maison brune avait pris le bon sens du vent qui soufflait dans la capitale en juillet 2009.

La lutte contre la corruption et la gabegie est porteuse d’espoir pour les couches les plus démunies .

Il y avait beaucoup de grains à moudre. C’est ainsi que même les hommes d’affaires et chefs d’entreprise les plus influents du pays, voire les hauts cadres de l’administration ont été épinglés par la justice.

Résultats, plusieurs milliards d’ouguiya récupérés pour sauver le trésor public obligé constamment à faire des gymnastiques budgétaires pour pouvoir payer les fonctionnaires et dettes de l’Etat. Cette bonne volonté du « président des pauvres » à s’attaquer à la racine du mal a même séduit les bailleurs de fonds le FMI et la Banque Mondiale qui ont octroyé lors de la réunion de Bruxelles près de 3 milliards de dollars pour booster le programme mauritanien de lutte contre la pauvreté.

Mais seulement au fil des temps, ces manœuvres populistes ont brouillé les cartes. Entre temps la Mauritanie est entrée en guerre contre les terroristes d’Al Qaïda et la crise économique s’est installée dans tous les foyers avec ses dégâts collatéraux, le chômage des jeunes et la hausse des prix des denrées alimentaires.

Sur les deux tableaux Ould Aziz va grever le budget en réarmant militairement son pays et en réformant l’armée avec l’appui de la France.

Mais c’est sans compter que la crise va perdurer. Pour ne pas connaître le même sort de Ben Ali ou Moubarak, le président mauritanien anticipe et débloque 9 milliards d’ouguiya pour lutter contre la hausse des prix des denrées alimentaires. C’est cet abus de pouvoir du chef de l’Etat que l’opposition fustige légitimement parce que le déblocage d’une telle somme obéit à une démarche c’est-à-dire un décret qu’il devait programmer avant et non des mois après.

Cette façon de faire n’est pas une rupture par rapport aux habitudes du passé. L’absence de vrais débats au parlement, la faiblesse du premier ministre concourrent à cette déconnexion entre la réalité et les lois des finances publiques. Pas étonnant que les trois grandes entreprises publiques de l’énergie soient au rouge avec un déficit global de 55 milliards d’ouguiya. Ce qui représente 2 fois le budget de la santé et 2,5 fois le développement rural. La SOMELEC, la SNDE et la SOMAGAZ sont des secteurs stratégiques mais coûtent très chers à l’Etat mauritanien qui aujourd’hui est loin de se conformer à l’appel d’offre des marchés publiques. La palme d’or de surendettement revient à la SOMELEC avec 35 milliards qui devraient profiter à plusieurs hommes d’affaires et de banquiers de la place qui pourraient toucher le pactole équivalent à 10 fois le budget alloué aux projets prioritaires de la lutte contre la pauvreté selon le rapport de l’UFP.

Une note salée pour le contribuable qui ignore totalement les rouages de l’Etat. Le citoyen mauritanien est tout heureux de voir il y a presque une année la naissance d’une nouvelle compagnie aérienne Mauritanian Airlines et pensait déjà oublier le calvaire des ex -employés de la défunte Air Mauritanie qui attendent toujours d’être indemnisés.

C’est encore la société nationale minière la SNIM qui a débloqué 40 millions de dollars pour ce nouveau joyau dont l’agrément des appareils n’est pas jusqu’ici obtenu et pendant ce temps c’est le contribuable encore qui va en pâtir avec des charges fixes d’au moins 30 millions d’ouguiya par mois. Ce n’est pas tout. Cette nouvelle compagnie en gestation a entraîné la fermeture de la deuxième compagnie Mauritanian Airways qui marchait cahin-caha. Cette faiblesse de l’Etat devant la pesanteur des lobbys va jusqu’à pousser les hommes du président à créer une société de transport public (STP) sans aucune étude de faisabilité au préalable. C’est comme ça que ça marche .

Le régime de Ould Aziz se soucie plus d’arranger un tel homme d’affaire ou chef d’entreprise ou aller dans le sens des desiderata d’un influent homme politique qui vont être les bénéficiaires de cette manne financière.

Ces privilégiés sont aujourd’hui les nouveaux riches de la Mauritanie Nouvelle. Ce climat de mal gouvernance et de prévalence de la corruption pourrait conduire le pays à une faillite financière et rebelote la situation de 2008, banqueroute, manque de liquidité, dépréciation de l’ouguiya et quoi encore ?

Pour ne pas en arriver là, l’UFP préconise la création urgente de commissions parlementaires ( majorité et opposition) pour trouver des solutions au moment même où le gouvernement de Ould Laghdaf fait face à la colère pour la première fois des diplômés ingénieurs, de la poursuite du mouvement des jeunes né du printemps arabe et qui sont descendus cette semaine dans les rues de la capitale pour demander cette fois-ci le départ de Ould Aziz.

Le personnel de la santé qui était en grève il y a deux semaines et les syndicats des Travailleurs de Mauritanie n’ont pas encore dit leur dernier mot. L’éruption du volcan social est à redouter si on ne fait rien.

Kane Chérif

Source  :  Mauritanie-web via CanalRim le 26/04/2011

Articles similaires

Bouton retour en haut de la page