Economie : Comment l’Euro peut-il être à 400 ouguiyas au moment où la SNIM fait 2,2 milliards de dollars de recettes ?

monnaieLe marché international du fer connait actuellement une hausse de l’offre sans précédent face à une demande constante. Selon l’Association Chinoise de la Sidérurgie (ACS) dont le pays est le plus grand importateur au monde de minerai de fer, le cours du fer sur le marché international a atteint le niveau historique de 200 dollars par tonne.

C’est dire que la conjoncture internationale n’a jamais été aussi favorable pour la Société Nationale Industrielle et Minière ( SNIM ). La SNIM exporte en effet plus de 11 millions de tonnes de minerai par an. Compte tenu des prix actuels, son chiffre d’affaires annuel serait donc passé à prés de 2,2 milliards de dollars. A titre de comparaison, la SNIM avait fait, en 2009, un chiffre d’affaires n’excédant pas 533 millions de dollars sur la base d’un prix de vente de 53 dollars par tonne et des exportations de 10,3 millions de tonnes de minerai de fer. La SNIM a donc bénéficié d’un surplus exceptionnel de recettes annuelles de plus de 1,6 milliard de dollars soit plus de 480 milliards d’ouguiyas.
Qu’a fait la SNIM de ce pactole ? Ces ressources extraordinaires ont-t-elles eu des effets positifs sur l’entreprise elle-même et sur l’ensemble de la collectivité nationale qui a consenti par le passé, dans des moments difficiles, d’énormes sacrifices pour sauver la SNIM afin qu’elle continue à jouer le rôle de poumon principal de l’économie nationale ? Les Mauritaniens vont-ils tirer profit de l’embellie financière de cette entreprise que certains ont tenté de brader , il n’y a pas si longtemps, à des intérêts étrangers moyennant 400 millions de dollars seulement ?
Les travailleurs de l’entreprise et les populations de la région ne semblent en tous cas pas en avoir profité. Le 28 Mars dernier, des centaines de travailleurs journaliers ont manifesté à Zoueratt contre l’exploitation inhumaine dont ils sont victimes depuis des années. Ces travailleurs sont employés par la SNIM, à travers des contrats de sous-traitance d’un autre âge, dans des conditions abominables : salaires misérables, travail pénible, absence de toute sécurité sociale, … La SNIM continue, au mépris du Code du travail et des lois de la République, de refuser la régularisation de la situation de ces travailleurs qui s’échinent pour subvenir aux besoins de centaines de familles mauritaniennes nécessiteuses. La SNIM continue également de s’abstenir de procéder à de nouveaux recrutements au moment où le problème du chômage, celui des cadres en particulier, se pose avec une acuité dramatique au gouvernement.
Par ailleurs, l’augmentation des prix à l’exportation du minerai de fer aurait dû contribuer à améliorer la situation extérieure du pays. On observe, au contraire, que la manne en devises résultant de cette hausse exceptionnelle des prix du fer ne semble avoir eu aucun effet bénéfique sur la valeur de l’ouguiya et beaucoup s’étonnent, à juste titre, que c’est paradoxalement au moment où la SNIM engrange un volume de recettes sans précédent de plus de 2 milliards de dollars que le taux de change de notre monnaie nationale tombe, pour la première fois, à plus de 400 ouguiyas pour 1 euro.
Les recettes de la SNIM auraient-elles pris un autre chemin que celui des réserves en devises de la Banque Centrale de Mauritanie ? Sinon, comment expliquer cette forte détérioration du taux de l’Ouguiya ? Quelle logique peut expliquer que la valeur de l’ouguiya soit plus élevée il y a 10 ans quand la tonne de fer se vendait à moins de 20 dollars que maintenant où elle se vend à 200 dollars ? Qui se paye alors la tête du patron ?
En tout état de cause, les informations disponibles font craindre que les fonds issus de l’augmentation extraordinaire des prix du fer aient été utilisés sans tenir compte des exigences de modernisation de l’outil de production et des programmes de développement des ressources humaines et de la recherche minière qui conditionnent l’avenir de l’entreprise. Il est à craindre qu’ils aient été utilisés, dans un déploiement d’amateurisme et d’improvisation, tantôt pour subventionner d’innombrables filiales non rentables et non viables pour la plupart ( GMM, COMECA, SAMIA, SOMASERT, ATTM, SAMMA, SAFA, MAI …), tantôt pour financer, au pied levé, des dépenses publiques non programmées.
Les pouvoirs publics doivent, avant qu’il ne soit trop tard, situer les responsabilités dans cette affaire dont les conséquences politiques sont incalculables. L’expérience enseigne que les marchés des produits de base sont particulièrement volatiles. Aujourd’hui ou demain, la SNIM n’est pas à l’abri d’une chute spectaculaire des prix du fer. Les Mauritaniens s’interrogeront alors sur la façon dont a été utilisée cette manne financière et demanderont des comptes à tous ceux qui en ont honteusement profité au détriment du développement minier du pays et de l’intérêt général de ses populations.
Bouna Cherif

L’ACS suggère des réserves stratégiques en minerai de fer
L’ACS (Association chinoise de la sidérurgie) a suggéré le 22 février d’établir des réserves stratégiques en minerai de fer pour le bon développement de la sidérurgie chinoise. Une récente enquête menée par l’association a en effet révélé une forte manipulation des prix du minerai de fer sur le marché international.
Selon l’ACS, la Chine est le plus important importateur au monde de minerai de fer, avec une importation représentant à peu près 75 % des transports maritimes de minerais de fer. Cependant, les trois principaux exploitants mondiaux (Vale do Rio Doce, Rio et BHP Billiton) représentent un oligopole et persistent à tirer les cours vers le haut. Les aciéries chinoises souffrent ainsi d’une baisse continue de leurs profits.
Wu Xinchun, secrétaire en chef adjoint de l’ACS, a déclaré que la manipulation du cours du minerai de fer était flagrante. D’autre part, l’importation chinoise s’est accrue depuis le mois de septembre 2010, et a largement dépassé les demandes pour la production de fonte. En même temps, les demandes en acier brut produit en Chine ont également augmenté sur le marché international. Le cours du minerai de fer s’est élevé à 200 USD par tonne, soit un niveau historique, et le prix de l’indice a également atteint 180 USD par tonne.
« En fait, le prix moyen de l’importation de minerai de fer a été de 128 USD par tonne en 2010 pour la Chine, et de 150 USD par tonne au premier trimestre de cette année. Aujourd’hui, avec 180 USD par tonne pour l’indice, on voit bien que les fournisseurs sont en train de gonfler les prix, et les aciéries sont très préoccupées », a expliqué M. Wu.

Source: China.org.cn via Le Quotidien de Nouakchott



Articles similaires

Bouton retour en haut de la page