Je suis bien conscient que le seul fait de poser cette question me vaudra insultes et réprobations de la part de certains de mes camarades. Mais le temps est peut-être venu pour chacun d’entre nous de prendre ses responsabilités, et poser la question du sens de notre stratégie de lutte. Car j’ai l’impression que depuis le départ de TAYA, mon organisation politique est comme déboussolée, sans stratégie claire.
Mais le plus grave, c’est qu’elle donne l’impression de s’être abonnée définitivement à la lutte par procuration. Incapable de s’adapter à la situation nouvelle et au nouveau contexte politique qui rendent définitivement caduque un militantisme de type clandestin ou d’exil, les FLAM peinent à trouver leur chemin face à l’alternative : lutte interne/lutte externe. Nous voilà encore à la veille d’’un congrès qui était prévu, selon un premier plan, pour se tenir en Mauritanie afin de marquer un nouveau tournant politique. Aujourd’hui, cette hypothèse semble abandonnée au profit du réchauffé habituel qu’on connait, et qui révèle chaque année des clivages de plus en plus profonds au sein de notre organisation.
Face à cette situation d’indécision, il ne nous reste plus qu’à jouer désespérément les gardiens d’un temple qui ne vit que de son mythe d’antan, professant toujours les mêmes oracles désormais inaudibles, maudissant les moindres différences exprimées, via l’encre dé(lé)bile de plumes baveuses, rameutées ça et là par le responsable du site, désormais seul maître à bord d’un navire en mal de gouvernance. Le timonier, le président Samba THIAM, n’étant plus maître de la communication de son propre mouvement, regarde amèrement et avec solitude, du haut de son perchoir américain, ses dauphins tirer l’attelage à hue et à dia, dans un empressement presqu’impudique…
Pendant ce temps, que fait le mouvement pour faire avancer CONCRETEMENT la lutte que nous avons courageusement engagée avant presque tout le monde ? Pas grand-chose, si ce n’est la protestation habituelle ou le soutien mécanique à tout nouveau « messie » qui apparait sur la scène politique contre le pouvoir en place. Bref, de la lutte par procuration ! Hier c’étaient les leaders du FNDD, qui étaient nos procureurs patentés, aujourd’hui c’est Birame Ould Abeid ; en attendant de devoir les insulter demain, parce que l’histoire leur aura dicté de changer d’approche…
Quand est-ce que notre organisation assumera enfin sa propre stratégie politique, au lieu de se muer en distributeur de bons et mauvais points à l’endroit de ceux qui tracent leurs propres chemins ? Quand aurons-nous enfin le courage de nous confronter électoralement au jugement des mauritaniens dont nous nous érigeons les meilleurs défenseurs? Ce que j’attends de mon organisation et de ses leaders, ce sont des réponses claires à ces questions que bien des militants se posent depuis un certain temps. Ce que je veux c’est un débat dépassionné, loin du courroux des habituels excités, un débat d’idées qui éclaire les militants et l’opinion. J’en ai assez de voir mon organisation réduite à n’être que l’éternel objecteur de conscience des autres. Ils agissent, nous critiquons et commentons ! Nous parlons plus des autres que de nous-mêmes, critiquons plus les opposants modérés au système que le système lui-même… Il y a dans l’attitude de notre mouvement, et notamment de certains de ses militants, un terrible aveu d’inertie et d’immobilisme qu’il va falloir penser et… panser.
Je fonde mon espoir sur la nouvelle génération de jeunes leaders des FLAM comme Abda Wone, pour démontrer plus de courage que leurs ainés, afin qu’une stratégie limpide aboutisse enfin. Je suis déterminé à secouer le cocotier tant qu’il le faudra, car ce débat est nécessaire, quoique dusse essuyer ma modeste personne comme injures et baves des quelques uns qu’on enverra me « mordre », au lieu d’ouvrir courageusement ce débat au sein de notre organisation. Car il n’y a pas que moi à l’attendre. L’opinion mauritanienne m’est témoin.
Alpha Amare
Source:AJD/MR