Ouadane : la ville crie à la soif et exprime son ras-le-bol contre l’électricité onéreuse de BEEM

Cité ancienne classée Patrimoine Mondiale de l’Humanité par l’UNESCO, Ouadane est fondée en 1142, selon les écrits. La ville est située au Nord-Ouest de la Mauritanie, dans la wilaya de l’Adrar distante de la capitale régionale –Atar- de 175 km.Ouadane fut durant des siècles une cité caravanière très riche. Mais suite au déclin du commerce transsaharien et aux différents cycles de sécheresse, la ville est tombée en ruine.

Ce qui se constate aisément sur place dans l’ancienne ville dont le climat est marqué par un environnement extrême même si les contraintes physiques du milieu, ont contraint les hommes à s’y adapter. Repliée sur elle-même, la cité semble être tombée dans l’oubli. Malgré tout, Ouadane se réveille chaque année avec ses hommes et ses femmes pour faire face aux nombreux défis qui jalonnent le développement économique et social de la moughataa. Parmi ces défis, celui de l’eau et de l’électricité préoccupe la population de Ouadane. Surtout les femmes qui crient leur ras-le-bol de la rareté de l’eau et du coût exorbitant de l’électricité domestique fournie par la société BEEM, bénéficiaire d’une licence de délégation de service public de l’Etat mauritanien pour cette prestation de service dans la ville de Ouadane. En outre, la saison touristique cette année, risque d’être catastrophique avec les événements qui se déroulent en ce moment entre notre pays et des éléments d’AQMI.

Abdellahi Ould Mohamed, 1er adjoint au maire nous apprend qu’un groupe de femmes n’a pas hésité à se rendre à la moughataa, il y’a quelques jours, pour manifester leur courroux auprès du hakem de la moughataa, Sidi Mohamed Ould Sidina, contre les factures salées de l’opérateur BEEM. A l’en croire, plus personne dans la ville ne veut de cette électricité trop onéreuse. Et il explique : « jusqu’à 25 kw de consommation, le prix du kw est facturé à 51 ouguiyas et la taxe fixe à 700 ouguiyas. Au-delà de cette plage de consommation la facture du kilowatt revient à 81 ouguiyas et la taxe fixe à 1750 ouguiyas. Au-delà de 120 kw, le kilowatt est facturé à 90 ouguiyas et la taxe fixe à 7.000 ouguiyas ». Abdellahi Ould Mohamed estime que ce n’est pas normal, d’autant qu’à Chinguetti le prix du kilowatt coûte au client 36 ouguiyas. « Je ne comprend pas les raisons d’une aussi grande disparité dans la prestation de service. Avec ce coût onéreux de l’électricité, les abonnés se retrouvent avec des factures de 10, 15, 20, 25 jusqu’à 30 mille ouguiyas. Il est impossible de payer ces factures. C’est pourquoi bon nombre de clients de la société BEEM ont renoncé à l’électricité », martèle t-il. Assis à côté, renchérit : « la facture qui m’a été livrée est encore à la maison, elle est de 51.000 ouguiyas. Je n’utilise plus l’électricité, j’ai arrêté parce que je n’ai pas les moyens de m’acquitter de tels montants ». Donnant son avis sur la question, la dame pense que cette prestation de BEEM n’en vaut pas la peine et qu’il faut aviser en se tournant vers l’Etat pour lui demander de trouver une autre solution que ce privé. Et pour cela, ils sont unanimes, hommes et femmes, à lancer un cri du cœur au président de la République, Mohamed Ould Abdel Aziz, pour qu’il sache qu’ils ne sont nullement satisfaits des prestations de service de la société BEEM. De ce fait, ils veulent d’une solution moins onéreuse à la problématique de l’électricité qui leur est fournie.
Quant à l’eau, elle est une source vitale de vie pour la moughataa. Et la ville enregistre un déficit cruel en eau. Ouadane, est une palmeraie d’une centaine d’hectares abritant environ 5000 habitants dont 60 % ont moins de 25 ans. Le village de Ouadane ne compte guère plus de 1000 habitants permanents. La population se compose d’agriculteurs pratiquant le maraîchage et la culture des dattes. Malgré leur rôle économique, les femmes participent très peu aux décisions collectives notamment dans la gestion de l’eau. L’eau d’irrigation est fournie par des puits artisanaux puisant dans la nappe alluviale qui a beaucoup souffert de la sécheresse de ces dernières années. L’eau potable provient d’un forage datant de 1985, réalisé dans un affluent de l’oued principal, et dont le débit est estimé à 7 m3 / h. Le réservoir actuel est d’une capacité de 15 m3 que l’on remplit quotidiennement. Ce qui permet d’évaluer une consommation effective d’environ 20 l / j / hab.
La nappe alluviale semble surexploitée mais il y a des potentialités suffisantes en eau souterraine, à condition d’être mises en valeur et exploitées convenablement.
Au niveau individuel, chaque foyer possède un bassin fermé, alimenté par tuyau souple, servant à tous les besoins domestiques. Ce que réclame les femmes de Ouadane de la part de l’Etat c’est des études sérieuse pour que de l’eau soit disponible en abondance autant à Ouadane ville que dans les autres localités du département, plutôt que de se fier à TOTAL qui assure sans problème ses besoins en eau et tente de distraire les populations du département par le « financement » d’un programme de développement économique et social de Ouadane.

Moussa Diop

Source  :  Le Quotidien de Nouakchott le 20/09/2010

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