En direct du Sarkozistan, Etat voyou (suite)

Par Daniel Schneidermann le 16/09/2010, Correspondant spécial de l’agence ouzbek, Paris, 15 septembre.

La camarilla au pouvoir en France (pays d’Europe occidentale également nommé le Sarkozistan par certains impertinents internautes locaux) a été prise mercredi d’une inquiétante crise de nerfs.

Elle est sans doute imputable au fait que ce petit Etat voyou, moyen et peu influent, mais au passé prestigieux, se retrouve brutalement sous la loupe des pays voisins, situation qui réactive le traumatisme impérial et colonial de l’époque où le « grand pays », (selon l’expression d’un sous-ministre local (voir nos éditions d’hier) s’était momentanément doté d’un exceptionnel pouvoir de nuisance. Episode du jour : le président, recevant officiellement à déjeuner, au palais présidentiel, sur fonds publics évidemment, des parlementaires de son camp, a suggéré que le Luxembourg, minuscule principauté voisine que les dirigeants français traitent traditionnellement avec un mépris inébranlable, « accueille des Roms ». Le gouvernement du Luxembourg a réagi avec colère. A mots couverts, pour ne pas compromettre une relation toujours empoisonnée, soixante-dix ans après, par la dernière guerre mondiale, l’Allemagne, pays mitoyen, a condamné la France. Sarkozy n’a reçu le soutien que du leader italien Berlusconi, un magnat septuagénaire des médias, lui-même empêtré dans une polémique avec la haute hiérarchie de la religion locale (le « catholicisme »), à la suite de scandales sexuels à répétition avec des bimbos.

Mercredi soir, sur leurs écrans, les Français ont été témoins d’une scène inhabituelle. En violant une disposition mineure du réglement intérieur du Parlement, le clan présidentiel a fait voter sa réforme des retraites. Le président du Parlement, un homme-lige du pouvoir, a été poursuivi jusque dans ses somptueux appartements privés par les parlementaires d’opposition, aux cris de « démission, démission ». Parvenant à prendre la parole dans les couloirs quelques heures plus tard, sous bonne garde, il tremblait encore, ce que même la télévision d’Etat a dû mentionner, signalant dans une litote inhabituellement évocatrice qu’il était « physiquement marqué » par la scène. Rien ne semble pourtant devoir entraver le vote définitif de la réforme. L’opposition modérée, dite socialiste, a réagi d’autant plus violemment dans les couloirs, qu’elle est secrètement très divisée sur les alternatives à la réforme imposée par le pouvoir. De manière inexplicable (et que personne ne cherche à expliquer) elle continue en effet de se situer intellectuellement dans le cadre du système libéral de soumission aveugle à des agences de notation corrompues, en dépit des crises financières à répétition qui en démontrent l’inefficacité, comme l’ont noté dans la journée un groupe d’économistes « atterrés », dont la plainte n’a eu aucun écho dans les médias officiels.

En marge de la crise politique, un tabloïd français révèle le scandale du jour : le chef de la police du régime a fait classer l’an dernier une plainte contre son fils, âgé de 16 ans. Alors qu’il conduisait son scooter en état d’ivresse sur les Champs Elysées, le fils du prétorien (ami d’enfance de Sarkozy) avait traité de « grosse merde » un policier qui le contrôlait. La plainte du policier n’a jamais connu aucune suite, après que le hiérarque se fut entretenu sans témoins avec lui, dans l’enceinte même du commissariat. Aphatiques et résignés, les Français ne s’attendent évidemment pas à quelque sanction contre le chef policier. La tradition d’impunité des prétoriens du président, en France, est constante, tous clans politiques confondus. Détenteurs de lourds secrets, ils sont intouchables. Un des prédecesseurs de Sarkozy, François Mitterrand, a ainsi couvert de nombreuses illégalités commises par ses « gendarmes » privés, des militaires initialement recrutés pour protéger la fille de sa seconde famille, née d’une union polygame connue de plusieurs journalistes proches du pouvoir, mais dont aucun média officiel n’avait soufflé mot, de longues années durant.

Source: @si

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