Tandis que ces rencontres avaient été perçues comme option de déconstruction d’une opposition campée sur une exigence de dialogue remontant aux accords de Dakar, la perspective d’un tête-à-tête Aziz-Ahmed devait consacrer un déclic pour une nouvelle dynamique dans la bataille politique en Mauritanie. Comme si finalement, le président du RFD, seul opposant à n’avoir jusque-là pas reconnu officiellement le verdict de la présidentielle du 18 juillet 2009, devait d’abord accepter Ould Abdel Aziz comme Président de la République, voilà qu’un communiqué emmenant du Bureau Exécutif de son parti passe pour semer la discorde.
« Le Président du parti (RFD, ndlr.) a accepté l’invitation que le Président de la République, M. Mohamed Ould Abdel Aziz, lui a adressée en vue de se concerter… » C’est ce qu’on a pu lire dans le communiqué envoyé à la presse par le service de communication du parti du chef de file de l’opposition. Suffisant pour que l’on constate que le RFD s’est peut être plié à la position de la COD. Du moins c’est à cela qu’il fallait s’attendre depuis que Boidiel avait affirmé après avoir été reçu à la présidence de la République. « Qui n’a pas reconnu les résultats ? » Avait alors rétorqué Ould Houmeid à un journaliste alors qu’il venait de tenir une réunion compte rendu de son entretien avec le président. « Nous n’avons plus de réserves maintenant.» Avait alors dit Boidiel tout en rappelant que le président était disposé à rencontrer tous les leaders de l’opposition et que le FNDD avait reconnu les résultats de la présidentielle du 18 juillet. Il avait même soutenu que si un parti de la COD ne reconnaissait pas ces résultats, la position de celle-ci était à assumer par tous. A présent voilà que ce parti (RFD) auquel il était fait allusion écrit noir sur blanc que Mohamed Ould Abdel Aziz est Monsieur le Président de la République.
Pas pourtant surprenant car Ahmed Ould Daddah avait plus d’une fois déploré que le Président Ould Abdel Aziz ne l’ait jamais appelé conformément à son statut de chef de file de l’opposition. Seulement le moment de cette rencontre est-il fortuit ? Ont-ils pu évoquer des sujets plus cruciaux que la notion d’opposition au comportement républicain ou de consensus minimal par rapport aux questions les plus sensibles ainsi qu’on laissé croire certaines agences d’information de la place?
A-t-il été réellement question plus des cadres de l’opposition à promouvoir au sein de l’administration publique que de sécurité pour une Mauritanie fraichement plongé dans une guerre contre la nébuleuse Al Qaida sans forcément y avoir été suffisamment préparée ?
Ahmed Ould Dadah a-t-il réellement évoqué le problème des ‘déchets toxiques’ dont il avait été dit qu’ils provoquaient des dégâts à Akjoujt chez les animaux ?
Les deux hommes ont-ils parlé de gabegie et de transparence dans les modes d’attribution des marchés ?
Ould Abdel Aziz a-t-il de son côté parlé des son séjour en France et de sa rencontre avec Sarkozy ? Ou alors a-t-il expliqué les raisons pour lesquelles mauritanienne s’est engagée dans une opération périlleuse de libération d’un otage français ?
La question est d’autant plus importante à poser que cette rencontre entre les deux hommes est intervenue après que le chef de l’Etat mauritanien est rentré de son voyage de la France ; après que l’attaque contre des terroristes a été effectué en territoire malien. Et, contrairement à son habitude, Ahmed Ould Daddah s’est abstenu de faire un point de presse. S’est-il soustrait à d’éventuelles questions dérangeantes ? A-t-il entrepris d’entrer dans un nouveau compromis avec le pouvoir ? Quelques jours après cette fameuse rencontre, Ould Daddah s’est envolé pour la France. Ce pays n’est peut-être pas étranger au rapprochement entre les deux hommes.
Kissima Diagana
Source : La Tribune N° : 512 le 02/08/2010