LE RAPT, SORDIDE « BUSINESS »

Les jihadistes d’al-Qaïda offrent une fortune à qui leur livrera un otage occidental. D’où leurs liens avec les malfaiteurs du Sahel.

La branche maghrébine d’al-Qaïda, qui détient actuellement deux Espagnols et un Français, s’associe avec des réseaux mafieux de toutes sortes pour récupérer des Occidentaux. Et négocier, grâce à ses liens avec des intermédiaires reconnus, des rançons en millions de dollars. Effrayés par les rapts de touristes, qui ont commencé en 2003 par le kidnapping de 32 Allemands et Suisses dans le sud de l’Algérie, les « toubab » (blancs) se font rares dans le désert. La plupart de ceux qui s’y aventurent, pour leur travail, le font sous forte escorte.

«On achète des otages»

C’est très loin des bases et des terrains d’opération d’Aqmi que les derniers otages ont été capturés, dans des régions auparavant réputées sûres. En décembre 2008, deux diplomates canadiens sont enlevés à quelques kilomètres de Niamey, au Niger ; ils seront libérés dans le nord du Mali cinq mois plus tard. En novembre 2009, c’est sur la route côtière de la Mauritanie, le long de l’Atlantique, que sont kidnappés trois humanitaires espagnols. Puis, le mois suivant, un couple d’Italiens est capturé dans le sud-est de la Mauritanie.  Ces rapts ont vite été revendiqués par Aqmi mais il ne fait aucun doute que des malfaiteurs de droit commun y ont participé. Arrêté mi-février, un trafiquant notoire, Omar ould Sidi Ahmed ould Hamma, dit « Omar le Sahraoui », a comparu fin mars devant le tribunal de Nouakchott. Il est soupçonné d’avoir capturé les Espagnols (dont une femme, libérée le 10 mars) et de les avoir livrés à Aqmi.  « Le mot est passé : « On achète des otages » », assure Louis Caprioli, qui a dirigé, de 1998 à 2004, l’action anti-terroriste à la DST française. « Les kidnappings sont maintenant le fait de groupes locaux, de truands parfois plus ou moins islamisés qui revendent leurs prises. Les hommes d’Aqmi quittent leurs refuges, dans le nord du Mali, lancent un raid pour venir chercher les proies et repartent. Ensuite, les négociations commencent et les millions obtenus permettent de verser de grosses primes aux ravisseurs initiaux ».

« Lingot d’or sur pattes »

Spécialiste des nomades sahéliens, Pierre Boilley, de Paris I-Sorbonne, ne s’est pas rendu sur le terrain depuis près de deux ans. « Mes amis maures ou touaregs, qui sont des chefs tribaux puissants, m’avertissent : « Ne viens pas. Même nous, on ne peut plus te protéger. Les jeunes sont devenus incontrôlables. Pour certains, tu es devenu un lingot d’or sur pattes » ».

 

Source: Dernières Nouvelles d’Alsace

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