Guinée : vague d’arrestations suspectes d’officiers pro-Dadis

lundi 14 juin 2010 / par Ismaël Kabiné Camara, Leila Kaddour-Boudadi

Le général Konaté purge l’armée des fidèles de l’ancien chef de junte.

Une dizaine d’anciens militaires, tous ex chefs d’état-major sous le régime du capitaine Moussa Dadis Camara, sont retenus depuis quarante-huit heures sur ordre du général Sékouba Konaté, à la gendarmerie de Matam, dans la banlieue de Conakry. Le motif de cette vague d’arrestations n’a été pas pour l’heure divulguée officiellement. Les interrogations se multiplient.

Il ne fait pas bon être un ancien chef d’état major du capitaine Moussa Dadis Camara. À deux semaines du scrutin présidentiel en Guinée, l’équipe du président de transition, Sékouba Konaté monte la garde plus que jamais. Exit Dadis Camara, ex chef de la junte militaire. Et pour faire place nette, rien de tel qu’une série d’arrestation de ses proches. Parmi les huit officiers supérieurs interpelés, en fin de semaine, figurent les colonels Oumar Sanoh, ancien chef d’Etat major général des armées, Mamady Mara, ancien chef d’état major de l’armée de l’air et Ansoumane Kaba, ancien chef d’état major de l’armée de terre. Les lieutenants-colonels Abel Haba, ancien chef d’Etat-major adjoint de l’armée de terre, Amara Samaké, ancien chef d’Etat-major adjoint de l’armée de l’air et Alpha Ousmane Diallo, ancien chef d’Etat-major adjoint de la marine ont aussi été mis aux arrêts. Seul, le lieutenant-colonel Abdoulaye Keïta, ancien chef d’Etat-major général adjoint des forces armées, aurait réussi à se soustraire à son arrestation mais reste activement recherché. Tous sont détenus dans les locaux de l’ancien escadron mobile N°3 devenu Mp3, situé dans le quartier Matam, dans la banlieue de Conakry.

Protéger le scrutin présidentiel

Cette vague d’arrestations intervient au lendemain du discours du président Konaté qui avait lancé une sévère mise en garde à quiconque aurait l’idée de bouleverser l’élection présidentielle du 27 juin. Cette allocution musclée prononcée lors d’une réunion de sécurité avec le haut commandement militaire n’a pas fait de doute quant aux personnes visées. Les soldats étaient en ligne de mire. Inconcevable donc pour le président guinéen de venir perturber les avancées de la démocratie en cours dans son pays. « Mes services ont à l’œil certains soldats qui s’agiteraient dans les casernes, voulant à tout prix saboter le processus en cours », a-t-il déclaré jeudi à la radiotélévision d’Etat. Le pouvoir en place reproche-t-il aux anciens généraux de Dadis Camara de vouloir perturber le scrutin du 27 juin ?

Suspicion de malversation financière ou règlement de compte ?

Selon des proches du chef d’état major général des armées, Nouhou Thiam, ces huits généraux auraient fait preuve par le passé ‘’d’un manque de sérieux dans la gestion des fonds destinés aux garnisons militaires.’’ Ces accusations pour malversation renvoient à l’époque où ces hommes proches du pouvoir exerçaient au sein de l’armée guinéenne. Un audit mené par l’actuel chef d’état major général des armées, Nouhou Thiam, alors inspecteur général des forces armées, avait révélé cet état de mauvaise gestion. Cependant, l’audit en question n’aurait pas prouvé la culpabilité des suspects. Des proches de Nouhou Thiam y voient plutôt une tentative de règlement de compte. Les hommes mis en cause, étaient pour la plupart chefs d’état major de l’armée et réputés proches du capitaine Moussa Dadis Camara, ex chef de la junte militaire.

Autre élément, au plus fort des négociations à Ouagadougou entre le capitaine Dadis Camara, le général Konaté et le médiateur de la crise Blaise Compaoré, la plupart des officiers supérieurs incriminés s’étaient montrés passifs voire complices des actes de désobéissance organisés par le collectif des membres du conseil national pour la démocratie et le développement (CNDD). Le CNDD était alors dirigé par Claude Pivi ministre de la sécurité présidentielle et Moussa Tiègboro Camara ministre en charge de l’anti-drogue.

A l’approche des élections présidentielles annoncées comme les plus ouvertes du pays, ces arrestations sans explication suscitent des interrogations quant aux velléités annoncées de démocratisation du pays.

 

Source: Afrik.com

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