L’ancien chef de la diplomatie sénégalaise, demeuré neuf ans au poste a rédigé, le 4 avril dernier, coïncidant avec le cinquantenaire, un manifeste intitulé ‘Luy jot jotna’ (il est temps d’agir) dans lequel il annonce la création d’un mouvement dit Mouvement politique citoyen (Mpc). Partant de ce qu’il appelle la découverte d’un ‘projet’, d’abord secret et ‘rampant’ et ensuite de plus en plus assumé et ‘debout’ de ‘dévolution dynastique du pouvoir’ dans notre République et comme pour marquer une rupture nette d’avec la politique qu’il a défendue d’avril 2000 à octobre 2009, le prédécesseur de Madické Niang met le doigt sur les difficultés qui l’obligent à sortir de son silence. Il s’agit, pêle-mêle, des inondations récurrentes des banlieues.
Tournant le dos au régime de Wade, l’ancien ministre des Affaires étrangères, après avoir dépeint un tableau sombre du Sénégal, fait un clin d’œil à l’opposition et aux autres mouvements de la société civile qui essaiment depuis quelque temps.
Ce, ‘alors que des ressources importantes sont allouées à des dépenses somptuaires de prestige comme des locations intempestives de jets privés et des voyages officiels (avec fortes délégations transportées, logées, nourries et payées aux frais du contribuable) et dont les justifications défient souvent toute rationalité’. Il s’agit, également, de ‘la multiplication des scandales financiers et l’amplification des formes de corruption, de chantage et de racket des entrepreneurs, du refus de ‘rendre compte’, de l’impunité (réservée à certains), de l’affaissement des institutions et de la mal-gouvernance endémique (qui) viennent refermer ce tableau peu reluisant, et constituent sans aucun doute un baromètre du niveau d’insouciance atteint en un temps record par des dirigeants qui, pourtant, avaient fait rêver tout un peuple’.
Face à une telle situation, d’une extrême sévérité, sur tous les plans (politique, économique, social et culturel), selon l’analyse de Gadio, ‘il est juste de ne pas livrer le sort de notre peuple à une pseudo fatalité ou à des forces extérieures ‘maléfiques’ ! C’est dire qu’il faut appliquer le ‘primat des causes internes’, c’est-à-dire le courage de se prendre comme cible au lieu de se réfugier dans la stratégie qui consiste à blâmer les autres pour nos propres échecs. Il est, en effet, pertinent de se demander : avons-nous fait tout ce qui était à notre portée et de notre ressort pour que le Sénégal qui, il y a cinquante ans était au même niveau de développement que la Corée du Sud, puisse éviter d’être aujourd’hui récipiendaire de l’aide et de l’assistance de ce pays devenu lui membre de l’Ocde ?’. Et c’est adossé à une telle analyse que lui et ses camarades ont décidé de lancer le Mouvement politique citoyen (Mpc). Car, disent-ils, ‘il est urgent d’agir !’. Gadio et compagnie disent tirer leur force et fonder leur espérance et leur optimisme dans ‘le coup de semonce historique et le formidable élan de dignité, de résistance et d’opposition du peuple sénégalais au ‘projet monarchique’, brillamment exprimés lors des élections locales du 22 mars 2009’.
Gadio salue…le rôle de Bennoo et adhère aux assises
D’ores et déjà, l’on peut dire que le Mouvement politique citoyen qui ‘salue l’action politique de Bennoo Siggil Senegaal, dans son rôle de partenaire incontournable dans la reconquête et la consolidation de la démocratie et la préservation de la République au Sénégal’ pourrait s’ancrer dans l’opposition. ‘Nous réaffirmons notre grande appréciation des résultats obtenus lors des Assises nationales dans un partenariat inédit entre les formations politiques de Bennoo et plusieurs organisations démocratiques de la Société civile’, écrit-il. Pour le Mouvement politique citoyen, les conclusions de ces Assises constituent une précieuse contribution versée dans la corbeille plus large des multiples initiatives en cours, partout dans le pays et dans la Diaspora, et visant à épargner au Sénégal l’aventurisme destructeur d’individus dénués de valeurs et de principes qui complotent au quotidien le passage en force du projet de ‘succession dynastique’ dans notre pays, projet ‘désormais démasqué et voué à un échec certain et inéluctable’. Gadio de s’en prendre aux ‘lois dites du reniement comme le retour au septennat, la remise sur pied du Sénat, la création autoritaire du poste de Vice-Président, l’humiliation de l’Assemblée nationale et sa neutralisation, la fameuse et fort embarrassante ‘Loi Ezzan’, etc.’.
Le Mouvement politique citoyen dit tendre la main au mouvement Tekki de Mamadou Lamine Diallo, Demain le Sénégal de Mansour Sy Djamil, le Mouvement citoyen de Bara Tall et Fekke Maci Boole de Youssou Ndour. Et d’inviter à une ‘réconciliation véritable de la classe politique à travers un code électoral consensuel, une renonciation immédiate et sincère aux tripatouillages incessants de la Constitution (surtout avec le projet scandaleux en maturation de suppression du 2ème tour des élections)’.
Dans la même veine de la révolution institutionnelle, l’ancien chef de la diplomatie sénégalaise est d’avis qu’il faut, par exemple, ‘remplacer dans l’imaginaire populaire ‘Borom Rewmi’ (littéralement le ‘propriétaire du pays’) par ‘Njiitu Rewmi’ (le ‘dirigeant du pays’), et ‘Président bi mo ko yoor !’ (le Président est le seul maître du jeu) par ‘Askan wi rek mo ko yoor !’ (le peuple est le seul maître à bord)’.
Ibrahima ANNE
Source : www.walf.sn le 08/05/2010