Guerre des communiqués entre le pouvoir et l’opposition

Une semaine après le discours très critique du président de la République Mohamed ould Abdel Aziz contre l’opposition démocratique, la majorité qui l’a portée au pouvoir lors des élections présidentielles du 18 juillet 2009, vient de faire samedi soir dernier, sa première sortie de force, destinée à réitérer le même message de son chef, écartant tout partage du pouvoir avec des vaincus politiques qui continuent de nier un régime démocratiquement élu.
En l’espace d’une petite semaine, le pouvoir aura donc épuisé toutes ses cartes pour convaincre l’opinion publique de ses bonnes volontés pour le pays et pour discréditer l’image de l’opposition. Au tout début, le Premier ministre Moulaye Ould Mohamed Laghdaf avait organisé une conférence de presse, pour énumérer les nombreuses réalisations de l’actuel pouvoir. Pendant cette sortie, le chef du gouvernement cherchait à porter un démenti courtois aux critiques de l’opposition démocratique, sans verser dans l’escalade.
Une astuce politique que le président de la République s’est refusée de suivre, préférant tenir des propos virulents à l’endroit des leaders de l’opposition démocratique qu’il a comparé à des résidus d’anciens régimes, ayant longtemps érigé en système l’anarchie, le népotisme, le clientélisme….

Au cours de son mot prononcé avec un ton emporté, le président a clairement écarté toute option de dialogue avec l’opposition, déclarant qu’il n’ y aura pas de partage du pouvoir avec elle, même pas la moindre portion congrue, estimant qu’elle doit en premier, prendre conscience de ce choix politique, savoir et accepter de jouer son rôle normal d’opposition dans un système démocratique.
Dans son discours devant les populations d’Arafat, le chef de l’Etat a apporté également un démenti catégorique à la plupart des accusations de l’opposition, indiquant que contrairement à ce que dit celle-ci, le régime n’est pas opposé au dialogue, mais plutôt disposé à toute concertation constructive ou débat loyal sur les antennes de télévision, la radio et la presse indépendante, voire même dans les rues et espaces publics.
S’expliquant sur les raisons du blocage du dialogue prôné par l’Accord de Dakar, ayant mis à l’époque, un terme à l’impasse politique mauritanienne, Ould Abdel Aziz a précisé qu’il est à écarter, tant que l’opposition n’aura pas reconnu d’abord son élection à la présidence de la République.
Avant d’ s’étaler sur les reprises de ces critiques virulentes faites par les partis de la majorité samedi soir dernier, rappelons que l’opposition démocratique avait organisé entre deux temps, une violente riposte au discours de Ould Abdel Aziz. C’était au cours d’une conférence de presse organisée la semaine dernière, animée par le président de l’Assemblée nationale Messaoud ould Boulkhier, également président en exercice de la Coordination de l’Opposition Démocratiques. Dans ses propos qui s’inscrivaient pour leur totalité dans l’apport d’un démenti catégorique aux déclarations du Président de la République, Messaoud a d’abord indiqué qu’il n y a pas eu de rupture des relations avec Israël, comme le prétend le pouvoir, précisant que l’actuel pouvoir file un parfait idylle, mais dans la discrétion totale, avec l’Etat sioniste. Le président de l’Assemblée nationale a souligné également que le pays s’enlise, chaque jour davantage, dans une crise multidimensionnelle, du fait de l’improvisation et de la gestion inconséquente des affaires du pays par Mohamed Ould Abdel Aziz et son pouvoir. Evoquant la grogne sociale, Messaoud a signalé qu’elle va s’amplifiant, entretenue par la précarité, le chômage, la hausse vertigineuse des prix, la détérioration des conditions de vie des populations, surtout les plus vulnérables ; en plus du règne de l’insécurité, contrairement aux allégations officielles, dans nos villes et sur toutes nos frontières. Tout cela, sans que les pratiques du régime laissent entrevoir une quelconque conscience des dangers encourus, ni une stratégie de sortie de crise. L’opposition démocratique a également ajouté que le pouvoir actuel refuse de faire preuve de plus de responsabilité, de persister dans ses errements, s’employant à réveiller les démons de la haine et de la discorde au sein des populations. Et d’ajouter que le pouvoir de Ould Abdel Aziz chercher à porter préjudice à la sérénité des relations avec les pays voisins ( allusion au Mali) « renie les engagements qu’il a signés dans le cadre de l’Accord de Dakar, se pourfend en accusations, invectives, et menaces de toute sorte contre l’Opposition démocratique et, comble de l’irresponsabilité, s’attaque illégalement et ouvertement à une institution républicaine – le Conseil Constitutionnel – et dans les médias publics en plus ».
Pour la COD, l’heure est à la grande mobilisation de toutes les forces vives mauritaniennes pour prendre conscience du chaos politique et pour un sursaut visant à sauver le pays avant qu’il ne soit trop tard.
Pour compléter le décor de son combat politique, la majorité qui soutient Ould Abdel Aziz s’est fortement mobilisée elle aussi pour annoncer à l’opinion publique qu’elle reste soudée et décidée à appuyer le programme du chef de l’Etat. Le meeting de samedi dernier est incontestablement le plus important depuis le coup d’Etat du 6 août 2008, rehaussé par la présence en première ligne du chef du gouvernement, des ministres, des parlementaires et des autres élus, mobilisés au sein de 38 formations politiques toutes alignées sur le projet de société de Ould Abdel Aziz.
Le discours tenu lors de ce meeting, par des hauts responsables de l’UPR, par Mme la Ministre des Affaires Etrangères et de la Coopération a versé dans le même but à savoir la critique sans frontières de l’opposition.
Au rythme où les choses en sont arrivées, on sait pas à qui sera le tour demain pour accuser l’autre partie de tous les maux et se constituer aux yeux de l’opinion publique comme le seul ayant réellement raison. Quoi qu’il en soit, ce dialogue des sourds replonge la Mauritanie de nouveau dans l’impasse politique d’avant l’accord de Dakar, faisant éloigner les chances d’un dialogue constructif et serein, sans lequel, la Mauritanie sera toujours fragile, exposée aux caprices des loups politiques de deux camps.

Mhd

 

Source: points chauds

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